Au bal des faux-culs, il y a ceux qui tentent de profiter de
l’affaire Cahuzac (UMP, Front national, Front de gauche et consorts) et ceux
qui essaient de n’y être pas associés (PS essentiellement).
Tous parlent de «moralisation de la vie politique» alors
qu’ils sont tous, de l’extrême-gauche à l’extrême-droite en passant par la
Droite, la Gauche et le Centre, dans cette vie politique depuis longtemps et
qu’ils n’ont pas fait grand-chose pour la «moraliser», sans que l’on sache
exactement ce que qu’ils veulent dire concrètement (le savent-ils, eux-mêmes, d’ailleurs…).
Et puis il y a les médias, notamment ceux qui font de l’info
24 heures sur 24, à la recherche constante d’un buzz quelconque, qui
dramatisent à l’envie l’affaire en parlant d’onde de choc, d’affaire d’Etat et
autres grands (gros) mots, un œil sur leurs taux d’audience respectifs.
Des journalistes dont certains oublient leurs manquements à
leur mission d’information (et non de propagande) mais qui va leur demander
d’être «moraux»…
Tous, en tout cas, prétendent parler au nom des Français qui
seraient, selon eux, scandalisés et écœurés par la malhonnêteté du personnel
politique auquel ils ne font plus confiance depuis des lustres avec la fameuse
expression, «tous pourris».
Mais, au fait, de quoi parle-t-on, exactement? D’un ministre
qui a caché son compte en Suisse puis a menti sur le fait d’en posséder un.
Un épisode éminemment affligeant et lamentable, oui
certainement, de la part d’un élu de la nation qui plus est, a accepté le poste
de ministre du budget...
Dans cette affaire, Jérôme Cahuzac n’a pas commis d’actes
délictueux dans le cadre de sa fonction de ministre (son mensonge n’ayant eu aucune
conséquence sur son action ministérielle).
De même, il n’y a pas eu mort d’homme, pas de détournement
de fonds publics, pas d’enrichissement personnel sur le dos des contribuables,
pas de trahison au profit d’une puissance étrangère ennemie, pas de complot
contre la république.
Soyons donc un peu plus… humain.
Car personne de sensé ne peut demander au monde politique
d’être composé de surhommes et de surfemmes, de super-héros qui seraient
parfaits et au-dessus du peuple et de ses travers.
D’ailleurs, ceux qui se sont prétendus comme tels, comme
Cromwell ou Robespierre, n’ont été que des despotes qui ont fait régner la
terreur au nom, justement, d’une perfection impossible à atteindre (et qu’ils
étaient loin d’atteindre eux-mêmes).
Que celui qui n’a jamais fauté lance la première pierre
disait Jésus dans une de ses interpellations les plus fortes à une populace qui
allait lapider une femme accusée d’adultère.
Le mensonge en politique comme dans la vie de tous les jours
est une réalité. Et il est, non seulement, impossible à éliminer totalement
mais il peut même remplir une fonction sociale et permet parfois de nous
protéger de l’extérieur.
Et puis, il ya mensonge et mensonge. Celui qui nous fait
dire à une mère que son enfant est très beau alors que nous n’en pensons pas un
mot n’est pas de même importance que celui qui affirme que les juifs ou les
noirs sont des sous-hommes.
Mentir sur la détention d’un compte en Suisse (ou à
Singapour…) n’est évidemment pas aussi condamnable que mentir sur le
détournement de millions d’euros d’argent public.
Pour autant, il n’est pas question d’excuser monsieur
Cahuzac et il est tout à fait normal qu’un politique qui ment, perde la confiance
de la population.
C’est pour cela que Bill Clinton, alors président des
Etats-Unis, avait été aussi critiqué lors de l’affaire Monica Lewinsky (son
adultère avec une stagiaire de la Maison blanche).
Non pas parce qu’il avait trompé sa femme (ce qui est une
affaire privée) mais parce qu’il avait, devant les Américains, juré qu’il ne
l’avait pas fait.
Evidemment, la faute de Clinton n’avait aucune incidence sur
ses capacités à gouverner son pays et l’on pouvait comprendre son aversion à
déballer le linge sale de son couple devant les caméras du monde entier
d’autant que les groupes d’extrême-droite avaient décidé d’avoir sa peau.
Avec Jérôme Cahuzac, c’est un peu différent. Membre du Parti
socialiste et ministre du budget qui, en plus, demandait un effort sans
précédent aux Français pour qu’ils se serrent la ceinture, la détention d’un
compte caché pour ne pas avoir à payer d’impôts est nettement plus grave
politiquement parlant.
Oui, Jérôme Cahuzac doit être sanctionné judiciairement et
politiquement pour ce qu’il a fait et pour ses mensonges. Néanmoins, il se
révèle avant tout plus minable et pathétique qu’autre chose, incapable d’avoir
de la responsabilité et de la dignité, surtout d’être à la hauteur de sa charge
d’élu du peuple et de ministre de la république vis-à-vis des Français.
C’est bien là que se trouve le nœud du problème dans la
responsabilité et la dignité - deux valeurs centristes par excellence - que toute
personne doit porter avec elle dans son existence et en tant qu’être libre dans
un régime démocratique.
Une responsabilité et une dignité qui se traduit dans le
respect que nous devons aux autres.
Si Jérôme Cahuzac les avait eues et avait respecté les
autres, il n’en serait pas là.
Cependant, aucune loi, aucun serment sur l’honneur ne
permettront de faire de tous les politiques des personnes respectueuses.
C’est dans ce que nous attendons, nous tous, de la politique
et de ceux qui décident de s’y investir, que se trouve en grande partie la
solution.
Non seulement pour ne plus croire les promesses intenables
et les discours démagogiques que nous savons tels mais également pour ne pas
nous en remettre à ceux qui les tiennent en les élisant ou en leur faisant
confiance les yeux fermés.
Oui, la démocratie républicaine est un combat. Oui, elle peut
exister que si l’on paye le prix de la liberté.
Celui-ci est fait de la responsabilité et de la dignité de
chacun de nous.
C’est ce qui nous élève et nous donne de grandes
gratifications.
Quand nous y renonçons, nous permettons à tous les
aventuriers de la politique de nous berner.
Nous pouvons décider que ce prix est trop élevé, que c’est
un fardeau et nous en remettre à ces aventuriers qui, un jour ou l’autre, ouvrirons
la porte à d’autres bien plus dangereux qui nous conduiront à des régimes
autoritaires et despotiques qui nous considèrent comme des gens irresponsables
et incapables de prendre notre destin en main.
Avant de tomber dans cette renonciation, regardons autour de
nous, dans ce monde où la démocratie est si rare et où la liberté est un bien
si cher à tous ceux qui ne l’ont pas.
Maintenant, au-delà de l’aspect judiciaire de l’affaire
(l’illégalité de la détention d’un compte non-déclaré en Suisse), c’est aux
Français de sanctionner politiquement monsieur Cahuzac.
A nous d’avoir aussi le sens du ridicule en ne réélisant plus
des hommes et des femmes politiques qui nous avaient menti …
Centristement vôtre.
Le Centriste