Lors de l’élection présidentielle, nous savions, nous
Français, mais surtout, nous, centristes, que les temps étaient
particulièrement difficiles et nous le disions et le répétions, appelant le pays
à une prise de conscience et les politiques à la responsabilité.
Nous proclamions, également, qu’il faudrait, quel que soit
le président qui allait être élu, mettre en place, avec la rigueur nécessaire
mais en évitant l’austérité destructrice, d’importantes réformes et des mesures
drastiques qui auraient déjà du être prises depuis des années, sur fond de
manque de croissance, de chômage en hausse, de déficits publics croissants, de
crise de l’euro et d’Union européenne en panne. Le tout avec un pays qui doute
de lui, le manque de confiance étant un handicap bien plus fort que tous les
autres.
Presqu’un an après la présidentielle, nous y sommes jusqu’au
cou.
François Hollande a, dans ce cadre, pris de nombreuses
décisions dont beaucoup difficiles pour un homme politique et sa popularité.
Sans parler de son appartenance à un Parti socialiste qui sait depuis longtemps
que des réformes sont indispensables mais qui était jusqu’alors incapable de
s’y rallier de peur de perdre son électorat.
Beaucoup de ces décisions auraient du être prises de toute
façon par n’importe quel président à la tête du pays, de Droite, du Centre et
même des extrêmes.
Dès lors, même si certaines n’ont pas été aussi profondes
qu’il l’aurait fallu, ne pas les supporter pour des raisons idéologiques et électoralistes,
c’est jouer contre la France.
C’est une faute politique que le pays paiera à un moment
donné.
S’y opposer c’est manquer ce moment historique où, enfin, de
la Droite à la Gauche, en excluant les extrêmes, un consensus pourrait se faire
jour, et dans la population, et chez les militants politiques, sur la réforme,
même sur des mesures dures mais que nous savons incontournables si nous voulons
bâtir un avenir meilleur à défaut d’un présent radieux.
Dans ce cadre, il faut saluer les propos de François
Hollande sur une «société apaisée» et de «réconciliation», deux termes chers
aux centristes qui montrent un ralliement à leur vision de la démocratie.
Bien sûr, tout n’est pas parfait, loin de là, dans le
gouvernement de la France.
Par exemple, faut aller beaucoup plus loin dans la
libération des énergies créatrices. De même, sur certaines questions de
société, des décisions très dangereuses sont prises ou sur le point de l’être
concernant l’adoption d’enfants par les couples gays ou l’utilisation des
cellules embryonnaires.
Bien sûr, les intentions ne sont pas toujours très claires
comme pour les retraites aves des déclarations contradictoires entre François
Hollande qui parle d’allongement des cotisations donc d’un départ plus tardif
et son premier ministre, Jean-Marc Ayrault, qui dit le contraire.
Bien sûr, la «centrisation» de François Hollande n’est pas
partagée par une part importante du Parti socialiste.
Dans ce contexte où il faut que tout le monde soit sur le
pont, une grande partie de la Droite a malheureusement décidé de jouer la
politique du pire avec une opposition frontale qui rappelle sur bien des aspects
celle, aux Etats-Unis, du Parti républicain, et notamment de sa frange
populiste le Tea Party, qui, depuis plus de quatre ans, a opté pour une
guérilla politique et médiatique sans concession contre Barack Obama sur tout
et n’importe quoi, lui déniant même la légitimité d’être au pouvoir comme cela
est le cas en France sur de nombreux sites et blogs de sympathisants et membres
de l’UMP pour François Hollande.
Les médias qui supportent cette droite «décomplexée» de plus
en plus radicalisée, tel le Figaro (dont pas un jour sans que la «une» ne soit
consacrée aux déboires et à l’incompétence de François Hollande), s’inspirent
de plus en plus de Fox News et de ses critiques dures et systématiques à
l’encontre du président américain en oubliant que la mission première d’un
journaliste n’est ni de dresser des louanges, ni de faire de la critique
systématique mais de dire ce qui se passe.
Il est dommage que nombre de centristes se soient alignés
sur cette stratégie, en particulier l’UDI et son chef, Jean-Louis Borloo (le
Mouvement démocrate et François Bayrou jouant un jeu plus trouble fait
d’approbations et de critiques pour se ménager tous les avenirs possibles).
Depuis des années que les centristes demandent des réformes
indispensables pour remettre le pays dans le bon sens mais qui, mises en œuvre,
ne seront évidemment pas populaires, ce n’est pas pour crier avec la meute
quand cela se produit, que cela vienne de la Gauche ou de la Droite.
De la même façon que les centristes ont applaudi à la
réforme des retraites de Nicolas Sarkozy même si elle était trop molle, il leur
faut reconnaître les efforts fait par François Hollande même s’ils demeurent
largement perfectibles.
Non pas qu’il faille prôner aujourd’hui une union nationale
qui na pas lieu d’être mais seulement espérer un consensus national sur les
problèmes les plus urgents dont on sait qu’il n’y a pas trente-six solutions
pour les régler.
Non pas que les centristes doivent former une coalition avec
le Parti socialiste, ni dresser des louanges excessives à François Hollande, ce
n’est pas à l’ordre du jour. Mais s’ils représentent les forces de la
responsabilité, du consensus et de l’équilibre, alors il faut qu’ils le
montrent dans leurs discours et dans leurs actes en critiquant de manière
constructive quand cela est nécessaire et en approuvant honnêtement quand cela
est le cas, le tout en alimentant, sur le fond, le débat politique.
Actuellement, on en est loin.
Les partis centristes ne devraient pas tomber dans le piège
tendu par l’extrême-droite et par la frange la plus intolérante de l’UMP, mener
une attaque frontale contre la légitimité du pouvoir républicain. François
Hollande a été élu démocratiquement et quoi que disent les sondages, ils ne
sont évidemment pas de la même nature qu’une élection dans une démocratie.
Qu’une droite dure et peu démocratique (ainsi qu’une gauche
de même acabit menée par le Front de gauche) saute sur l’occasion pour attaquer
le régime démocratique, ce n’est pas étonnant.
Que de nombreuses personnalités de la droite démocratique la
suivent, voilà qui est inquiétant.
Mais il ne peut être question pour les centristes de jouer
cette partition. A défaut, pour ceux qui s’enfonce dans cette irresponsabilité
politique, de n’être plus du Centre.
Car c’est dans les temps difficiles que l’on attend des
partis centristes qu’ils œuvrent pour le bien du pays tout entier et non pas
pour un camp ou des clientélismes particuliers.
On n’est pas défenseur du juste équilibre pour rien.
C’est ça aussi la grandeur d’être du Centre.