Par une tactique qu’il pensait subtile, Jean-Louis Borloo a
refusé d’aligner a priori la position de l’UDI sur celle de l’UMP en votant automatiquement
la motion de censure déposée par cette dernière ce mercredi 20 mars à
l’Assemblée nationale et en tentant de faire porter le chapeau de cet
alignement pourtant probable au refus du premier ministre, Jean-Marc Ayrault, de
répondre aux demandes qu’il lui avait faites, notamment en matière de politique
du logement et de services à la personne ainsi que d’arrêt des augmentations
d’impôts.
Du haut de la tribune du Palais Bourbon, le président de
l’UDI a, dans un discours assez déstructuré et pris d’une certaine excitation,
tenté de donner une consistance à ce qu’il appelé, par un oxymore dont les
politiques ont le secret, une «opposition constructive et résolue»…
Brandissant un sondage dans lequel, selon lui, les Français
approuvaient toutes ses demandes, il a, in fine, déclaré que son groupe
voterait la censure.
Au-delà de cette prestation parfois touffue, il était
évident, dès le départ, que l’UDI voterait la motion de censure et que les
demandes de Jean-Louis Borloo seraient ignorées par Jean-Marc Ayrault ce qui
permettrait de justifier cette décision.
Personne ne pouvait être dupe.
Dès lors, on peut se demander si Jean-Louis Borloo et ses
acolytes de l’UDI ont bien une stratégie compréhensible et constructive pour
exister entre le PS et l’UMP, stratégie qui consiste à être l’allié naturel de
l’UMP sans pour autant s’aligner sur ses positions tout en donnant des gages de
fidélité...
C’est bien un grand écart auquel doit se livrer l’UDI et son
leader afin d’affirmer sa spécificité face à l’UMP tout en demeurant son
partenaire politique et électoral.
En écoutant Jean-Louis Borloo à l’Assemblée nationale, on a
bien compris l’alliance UDI-UMP, on a moins relevé l’originalité de la position
de l’UDI face à celle de l’UMP.
Cela n’est guère étonnant car nous sommes dans une situation
paradoxale créée par Jean-Louis Borloo et dans laquelle il est en train de se
pièger lui-même.
En déclarant lors de la fondation de l’UDI que la seule
alliance possible et envisagée était avec l’UMP, il s’est autolimité dans sa
recherche d’une différence qui ferait que des électeurs de centre-gauche ou de
centre-droit préfèrent voter UDI plutôt que PS ou UMP.
Pouvait-il faire autrement alors qu’il a été un fidèle
collaborateur de Jacques Chirac puis de Nicolas Sarkozy, membre de l’UMP
pendant des années?
C’est pourquoi sa volonté d’être le représentant du Centre
posait un problème et continue de le poser.
C’est sans doute également la raison pour laquelle François
Bayrou bénéficie toujours d’un espace politique que Jean-Louis Borloo n’est pas
capable de lui disputer et d’investir de par son choix de positionnement
politique très proche, en réalité, de celui de l’UMP.
Est-ce que cette stratégie peut ouvrir un espace politique
assez grand et assez pérenne pour faire de l’UDI un parti politique de premier
ordre pour les années à venir? Il est bien sûr trop tôt pour en tirer une
conclusion définitive qui sera apportée lors des prochains scrutins nationaux,
que ce soit les municipales ou les européennes.
Reste que les électeurs centristes ont de quoi s’interroger
sur la pertinence de celle-ci.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC