Dans une interview au quotidien économique Les Echos,
François Bayrou a demandé à François Hollande d’«assumer» le «choix réformiste»
qu’il a «esquissé» pour redresser la France tout en sonnant «la mobilisation du
pays». Néanmoins, il n’a pas exprimé le souhait de rejoindre l’actuelle
majorité et a indiqué qu’il ne participerai pas à «une action gouvernemental»
qui ne soit pas en cohérence avec ce que je crois être essentiel pour mon pays».
Quant à l’UDI de Jean-Louis Borloo, il a, de nouveau, estimé
qu’il s’agissait d’une formation située à droite et non au Centre, tout en
souhaitant une alliance des réformistes de tous bords.
Au passage, il s’est décerné, comme c’est souvent le cas
chez lui, un satisfecit d’avoir prédit tout ce qui se passe aujourd’hui et qui
lui donne, selon lui, la légitimité de parler pour des millions de Français à
défaut d’avoir un poids politique suffisant au Parlement…
Extraits.
Que pensez-vous de la feuille de route du gouvernement pour les six
mois à venir?
Si l'on considère que la France
est vraiment dans une situation critique, que nous vivons un crash au ralenti,
et que notre modèle social n'y résistera pas, alors les annonces de cette
rentrée sont très éloignées du nécessaire. (…) C'est de concret et de fort que
notre pays a besoin, de mobilisation sur des décisions déterminées, robustes.
Ce plan général de ressaisissement, la mise en ordre du pays pour privilégier
la production, pour soutenir ceux qui prennent des risques, la redéfinition de
l'Etat, la stabilisation du droit et de la fiscalité, la simplification des
collectivités locales, cela ne se réalisera pas de manière anodine et sans
déranger personne.
La réduction drastique des dépenses publiques sur le quinquennat, le
contrat de génération, la future loi sur le marché du travail, n'est-ce rien?
J'approuve, je signe et je
contresigne, l'idée qu'il est impératif de réduire les dépenses publiques et
que l'Etat peut être non pas aussi efficace, mais plus efficace en dépensant
moins. (…) La seule phrase significative de cette période a été prononcée par
François Hollande lors de ses vœux aux Français, lorsqu'il a affirmé qu'il
voulait inverser «coûte que coûte» la courbe du chômage cette année. Il y a
dans ce «coûte que coûte» la possibilité d'une politique d'urgence et d'une
volonté réformatrice assumée.
François Hollande, a-t-il intérêt, politiquement, à choisir?
La fonction présidentielle n'est
pas politique mais historique. Or trop d'habileté est l'ennemi des choix
historiques. Je dis donc à François Hollande: assumez le choix réformiste que
vous avez esquissé! Tranchez! Assumez l'urgence politique qui s'impose, à la
Mendès ou à la Schröder. Il n'est plus temps de ruser! Ne cherchez pas les mots
à double sens. Conduisez les changements qui s'imposent, y compris
institutionnels, pour que cette politique réformiste trouve son soutien dans
l'opinion. Sonnez la mobilisation du pays! Et faites-le tôt! Prenez des
risques, c'est urgent! Plus vous tarderez à le faire, plus cela apparaîtra
comme un pis-aller, une défaite, une retraite.
(…)
Excluez-vous de participer un jour à un gouvernement de François
Hollande?
J'ai déterminé depuis 2002 une
ligne de conduite. Je ne participerai pas à une action gouvernementale qui ne
soit pas en cohérence avec ce que je crois être essentiel pour mon pays.
Vous n'avez plus de groupe parlementaire et n'êtes plus député, comment
définiriez-vous aujourd'hui votre rôle dans la vie politique française?
Je suis un non-aligné, un homme
libre, qui a dit sur tous les sujets critiques, et des années à l'avance ce qui
allait se produire. Des millions de Français le savent. C'est pourquoi j'exerce
en leur nom une responsabilité civique, qui est celle de l'exigence et même
s'il le faut de l'intransigeance sur l'essentiel. Si le mouvement de rejet des
formes politiques classiques se poursuit, vous n'aurez que deux types de
réponse: les extrêmes et la voie de reconstruction que je défends.
Jean-Louis Borloo a créé dans l'opposition l'UDI. Le centre a-t-il
trouvé son nouveau leader?
Notre vision de l'avenir est
différente. Après dix ans au sein de l'UMP, il recrée aujourd'hui une rivalité
avec ce mouvement. Et il pense que la guerre perpétuelle entre la droite et la
gauche est indépassable. Je crois au contraire que cet affrontement sans fin
est stérile et que pour redresser le pays, il faudra que les réformistes de
tous les camps, de la majorité comme de l'opposition, prennent ensemble leurs
responsabilités.