Dans cette rubrique, nous publions les points
de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du
CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser
la pensée centriste.
Jacques Rollet, chroniqueur régulier sur Le
Centrisme est politologue, auteur de plusieurs livres dont Tocqueville
(Montchrestien 1998), Religion et politique (Grasset 2001), La tentation
relativiste, DDB, 2004), Le libéralisme et ses ennemis (DDB, septembre 2011).
L’accord
signé entre le président de l’UDI et le président du MoDem ne peut que réjouir
tous ceux qui aspiraient à une réunion des Centres depuis la fin de l’UDF due à
François Bayrou …On peut espérer que cette alliance sera durable, ce qui
cependant, n’est pas garanti, les ambitions présidentielles du président du MoDem
étant semble-t-il, intactes. Un certain nombre d’élus UDI ne sont pas ravis de
cette introduction de la brebis galeuse qui a voté François Hollande.
Notre
propos n’est pas d’épiloguer davantage sur cet évènement mais plutôt de
réfléchir à l’absence maintenue de réflexion de fond sur l’identité
philosophique du Centre, problème que nous avons déjà évoqué dans des
chroniques précédentes. Deux points me semblent poser problème dans le texte du
protocole signé par les deux partis: qu’en est-t-il de l’humanisme républicain
dont se réclament les signataires? Quelle est cette social-démocratie avec
laquelle on déclare pouvoir s’allier éventuellement?
Signalons
avant d’exposer notre point de vue qu’une affirmation préalable du texte nous
pose problème: il est déclaré que l’alliance a lieu parce que la situation est
grave dans le pays, ce qui signifie qu’elle est conjoncturelle alors que selon
nous elle doit avoir lieu en tout état de cause: le Centre doit être unique ou
ne pas être, sinon c’est qu’il n’a pas de véritable identité…
Mais
venons-en au premier problème. Affirmer l’humanisme et le déclarer identique à la République,
c’est très bien mais cela reste flou. J’en veux pour preuve le fait que rien
n’est dit sur le rôle négatif joué dans la vie politique française par le vote
de la loi sur le «mariage» homosexuel. Faut-il rappeler que le mariage civil en
France est une institution et non pas seulement la consécration de deux désirs
subjectifs… C’est le mariage républicain qui est mis en cause par cette loi
voulue par la Gauche. Le mariage est l’union reconnue d’un homme et d’une femme
constituant alors une cellule de la société et donnant naissance à des enfants.
C’est tout cela qui est mis en cause totalement par cette loi même si on
s’acharne à le nier. Il faudrait bien mesurer le poids de la déstabilisation
institutionnelle créée par cette loi. Le doute a été institué par les
politiques qui ont voté ce texte, doute portant sur la confiance qu’on peut
faire aux élus qui doivent respecter les bases de l’anthropologie et non pas la
déstructurer. Un certain nombre de députés et sénateurs centristes ont voté
cette loi, ce qui nous semble ahurissant si on considère que le Centre doit
incarner l’équilibre et la sagesse politique au sens de la prudence
aristotélicienne.
Le
deuxième point problématique réside dans le rapprochement jugé possible avec la
vision social-démocrate de la société. L’impasse dans laquelle se trouve la
France est précisément due à la conception de l’Etat-Providence que développe
cette famille politique. C’est bien l’Etat-Providence qui est en crise financière
mais également idéologique: prendre de l’argent aux citoyens essentiellement de
la classe moyenne pour le donner à d’autres de façon automatique et
bureaucratique est tout le contraire d’une véritable solidarité qui doit être
un rapport visible entre personnes. L’assistanat se généralise en France et
explique une grande part de la dette française: les dépenses publiques
représentent en France 56% du PIB contre 46% en Allemagne: cherchez l’erreur.
Or les Allemands ne vivent pas moins bien que les Français. C’est bien la
social-démocratie ainsi comprise qui est en fin de course. Il serait bon que
les centristes le comprennent, ce qui est le cas d’élus comme Jean Arthuis et
Christophe Lagarde.
On aura
compris, je l’espère, qu’il y a un énorme travail de réflexion et de mise au
point à faire au sein de l’Alternative. Bon vent tout de même!
Jacques
Rollet.