Pour les élections législatives
de mi-mandat en 2014, les républicains modérés ont mis en route une campagne
pour discréditer et se débarrasser des élus les plus à droite du parti, ceux
qui bloquent toutes les initiatives et qui par leur extrémisme irresponsable
mettent à mal les institutions américaines mais empêchent également le Parti
républicain d’avoir une chance de remporter la majorité au Sénat et de pouvoir
espérer gagner les élections présidentielles.
Les derniers événements où un
petit groupe d’activiste d’extrême-droite a presque réussi à empêcher le
gouvernement de fonctionner correctement et de faire face aux engagements du
pays a été un révélateur surtout que les Américains estiment que le Parti
républicain est le premier responsable des dysfonctionnements de Washington.
Il faut donc que ce dernier réagisse
vite en prévision des joutes électorales qui s’annoncent mais aussi pour ne pas
perdre définitivement son âme forgée au fil des ans par des Abraham Lincoln,
Theodore Roosevelt et quelques autres grands présidents républicains.
Que ce soit à l’intérieur du
parti ou au Congrès, des élus et des candidats centristes mènent donc une
bataille violente contre les factions extrémistes avec, souvent, l’aide
financière des entreprises principales donatrices qui se sont aperçues que les
élus qui les composent, en particulier ceux du Tea Party, n’avaient aucune
envie de faire en sorte que le pays aille mieux s’il leur fallait composer avec
les démocrates, pire selon eux, avec leur ennemi honni, Barack Obama, sur fond
de racisme latent.
De même, ils préfèrent perdre les
élections (estimant qu’ils les gagneront un jour quand le peuple sera enfin
capable de comprendre leurs positions…) que de sacrifier leurs combats d’arrière-garde.
Deux initiatives récentes de ce
que l’on appelle aux Etats-Unis «l’establishment républicain» composé par les
principaux chefs ainsi que par les conservateurs modérés tentent de faire le
ménage.
C’est le cas de celle mise en route par l’ancien représentant de l’Ohio,
Steve LaTourette qui, fort d’un budget de huit millions de dollars, diffuse des
spots à la télévision dirigés contre ce qu’il appelle les «Senate candidates
hall of shame» (les candidats au Sénat membres du temple de la honte en
référence à tous les «halls of fame», temple de la gloire ou de la renommée,
qui honorent les plus grands dans de nombreuses disciplines surtout sportives
mais pas seulement).
Ceux-ci sont, entre autres, Todd
Akin du Missouri, célèbre pour avoir expliquer qu’une femme qui subissait un «viol
légitime» avait le pouvoir de ne pas tomber enceinte (une thèse extravagante afin
de combattre les avortements même en cas d’agression sexuelle) ou Christine O’Donnell
dont une des professions de foi de candidate avait été d’affirmer sans rire qu’elle
n’était pas une «sorcière» sans oublier ses déclarations sur le fait que le
viol était «une volonté de Dieu».
Devant tant d’obscurantisme,
Steve LaTourette espère réveiller la conscience des électeurs républicains et
leur faire comprendre que ces élus sont une menace même pour l’avenir du parti.
Selon lui, «la tentative de l’extrême-droite
de purger le GOP (Grand old party, surnom du Parti républicain) des gens qu’ils
estiment ‘imparfaits’ doit cesser. (…) Pour la première fois, il y aura un
groupe représentant l’aile responsable du Parti républicain qui ne fera pas
seulement que se défendre mais qui mènera l’offensive».
De son côté, la sénatrice du
Maine, Susan Collins a décidé de faire vivre dans la durée le groupe «bipartisan»
modéré «common-sense coalition» (coalition du bon sens) qu’elle avait créé avec
le sénateur démocrate de Virginie Occidentale, Joe Manchin, lors des blocages
idéologiques au Congrès de ces derniers mois qui avaient abouti aux coupes
budgétaires automatiques et avait failli provoquer le défaut de paiement de l’Etat.
Le groupe qui avait négocié la
sortie de crise regroupe seize élus qui veulent garder le contact et œuvrer pour
des solutions négociées et consensuelles.
Tout cela couplé avec la réélection
dans un fauteuil du républicain modéré, Chris Christie (et possible candidat à
la candidature républicaine pour la présidentielle de 2016), à son poste de
gouverneur du New Jersey, Etat très majoritairement démocrate, redonne espoir
aux républicains centristes que leur parti n’est pas en train de se
marginaliser pour les décennies à venir et qu’un retour vers le juste milieu (à
défaut, pour l’instant du juste équilibre) est possible dans un avenir pas trop
éloigné.
Ce serait évidemment une bonne
nouvelle pour le Parti républicain mais aussi pour la démocratie américaine.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC