Si 94% et 95% des sympathisants du Mouvement démocrate et de
l’Union des démocrates et indépendants veulent une union entre les deux partis
au centre de l’échiquier politique selon un sondage récent, qu’en est-il
réellement de leurs dirigeants.
Bien entendu, l’arithmétique électorale plaide en faveur
d’un bloc centriste ainsi que la crédibilité même du discours centriste.
A 12%-15%, on est plus audible politiquement parlant qu’à 6%
+ 6%.
Déjà parce que cela permet simplement d’avoir plus d’élus.
De même, dans le système français avec l’élection du
président de la république comme événement majeur phagocytant quasiment tous
les autres rendez-vous électoraux, il faut qu’un courant politique y présente
un candidat et fasse un résultat au moins honorable pour peser dans le débat
public au cours des cinq années qui suivent.
Tout cela est une évidence.
Mais ce qui est également une évidence, c’est les fractures
réelles entre les centristes que les paroles apaisantes, les gestes
d’allégeance et les grands sourires ne peuvent gommer instantanément.
Pas plus d’ailleurs que les ambitions qui se cachent à peine
derrière tout ce cérémonial de retrouvailles médiatiques.
Chacun se méfie encore de l’autre et du coup tordu qu’il
pourrait lui préparer en sous-main.
François Bayrou craint d’être marginalisé par l’UDI,
d’autant que son Mouvement démocrate n’a pas grand-chose à apporter dans la
corbeille des futurs mariés.
C’est pourquoi il prend la parole sans relâche et que ses
lieutenants martèlent que la légitimité centriste est de leur côté.
Jean-Louis Borloo, lui, craint une OPA de l’UDI par François
Bayrou grâce à surface médiatique bien plus importante que la sienne et à la
possibilité d’une alliance de circonstances entre ses ennemis extérieurs
(Bayrou et ses troupes ainsi que certains centristes de l’UMP) et intérieurs
(Morin et ses troupes ainsi que quelques caciques centristes de l’UDI qui ne
font pas confiance en la capacité du président de leur parti d’assumer un
leadership).
D’où un jeu de poker menteur qui s’est mis en place avec des
déclarations d’amour et de confiance mais aussi ces demandes répétées du côté
du Mouvement démocrate de respecter l’identité de chacune des parties et ces
affirmations constantes du côté de l’UDI que la seule stratégie possible est
l’alliance avec la Droite.
Faut-il rappeler que ces différences ne sont pas anodines
puisqu’elles sont en grande partie à l’origine de la séparation des centristes
depuis 2002 avec la création de l’UMP puis avec le départ massif des troupes
parlementaires de l’UDF après 2007.
Dès lors, il s’agit bien de savoir qui, à terme, va manger
l’autre et non comment vont coexister deux formations centristes dans une union
contractuelle.
D’autant que l’espace électoral centriste n’est pas assez
grand actuellement pour faire vivre deux partis avec un nombre conséquent
d’élus.
On saura bientôt, selon les dires de François Bayrou et de
Jean-Louis Borloo, le contenu exact du contrat de mariage qu’ils vont signer.
Il sera possible alors de savoir qui a gagné la première
manche.
Pas encore celui qui gagnera la partie.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC