Au moment où souffle la tempête à l’UDI après les propos de Gilles
Bourdouleix sur le fait qu’Hitler n’avait pas tué assez de gens du voyage (voir info), il n’est pas inutile de rappeler que c’est Jean-Louis Borloo,
président-fondateur de l’UDI, qui a fait le forcing pour accueillir le CNI –
dont le député-maire de Cholet est président – comme composante de l’UDI.
Par ailleurs, monsieur Bourdouleix n’a jamais été un simple
militant ou élu du parti mais bien un de ses vice-présidents, c’est-à-dire
venant en second dans l’organigramme aux côtés de personnes comme Jean Arthuis,
Chantal Jouanno ou Jean-Christophe Fromantin.
Ses propos inqualifiables prennent ainsi une dimension
supplémentaire dans l’analyse de ce qu’est l’UDI et de ce que veut en faire Jean-Louis
Borloo.
Nous avons toujours dit ici que la présence du CNI dans
l’UDI était une erreur, pire une faute, car cette formation flirte depuis des
années ouvertement avec les thèses du Front national et a souvent fait du
compagnonnage avec le parti d’extrême-droite.
Aujourd’hui, les langues se délient à l’UDI sur cette
étrange affiliation mais pourquoi si tard? Qu’un Jean-Christophe Lagarde ou
qu’une Rama Yade n’aient pas protesté de manière véhémente à la décision d’accueillir
le CNI au sein l’UDI par Jean-Louis Borloo est troublant, voire dérangeant.
D’autant que les propos de Gilles Bourdouleix pour qui le
connaît ne sont pas de ce point de vue une totale surprise. Leur véhémence et
leur contenu abject ont sans doute dépassé ses précédentes déclarations
publiques mais n’oublions pas qu’il ne se savait pas enregistré…
Cette histoire va-t-elle fragiliser Jean-Louis Borloo et/ou
va-t-elle permettre à l’UDI de se recentrer et de ne plus regarder vers la
droite parfois extrême pour se renforcer mais vers le centre de l’échiquier
politique, l’avenir proche nous le dira.
Car il demeure une question fondamentale que l’affaire
Bourdouleix révèle, quel est le vrai projet de Borloo pour l’UDI?
Cette question est pertinente parce qu’après une année
d’existence, beaucoup de monde, dont nombre de militants de l’UDI, se la posent.
Est-ce une nouvelle formation du Centre? De Droite? Une
démarche individuelle pour se venger de l’UMP et de sa non-nomination à
Matignon par Nicolas Sarkozy? Au contraire, est-ce une démarche voulue pour
rapprocher sans le dire une partie des centristes de l’UMP avec cette alliance
exclusive entre les deux formations sans cesse réaffirmée et ce, quel que soit le
programme politique de l’une et de l’autre? Une sorte d’Opni (objet politique
non identifiable) qui s’écrasera de lui-même faute de savoir où il va et,
surtout, ce qu’il est?
Pour le plus grand drame des udéistes, aucune de ces interrogations
ne peut être aujourd’hui écartée!
En outre, L’UDI, malgré le mot «indépendants» dans son
appellation est incapable d’aller à une élection majeure toute seule de peur de
se prendre une veste.
La voici ainsi à Paris, capitale de la France, dans une
stratégie, non pas d’alliance avec l’UMP, mais dans un sauve-qui-peut qui
n’augure rien de bon pour son avenir.
Au lieu de présenter des liste dans tous les arrondissements
de Paris, la formation de Jean-Louis Borloo a décidé de faire liste commune
avec l’UMP là où cette dernière détient déjà la mairie d’arrondissement et de
ne pas déposer de liste face à Nathalie Kosciusko-Morizet, la chef de file de
la droite parisienne.
Cela fait donc huit arrondissements sur vingt où elle sera
absente…
Bien évidemment, cette décision est présentée comme une
volonté d’union avec l’UMP qui, rappelons-le, est la seule possible selon les
dirigeants de l’UDI.
Mais à qui fera-t-on croire que s’il y avait eu une
possibilité pour les troupes de Borloo de se mêler véritablement à la course
pour la victoire, elles n’y seraient pas allées?!
En vérité, l’UDI va cacher sa faiblesse dans les villes où
elle a peur de se compter en constituant des listes d’union dès le premier tour
avec l’UMP, si celle-ci le veut bien.
Ce n’est que dans les villes où elle espère bien figurer
qu’elle présentera des listes.
En langage courant, cela s’appelle un manque de courage
politique et une drôle de façon de justifier sa création comme force politique
autonome avec un projet original.
En revanche, il s’agit d’une manière de procéder courante
chez Jean-Louis Borloo et bien connue de ses amis politiques.
Rappelons que celui-ci a renoncé à se présenter à la dernière
présidentielle, puis à la mairie de Paris et désormais comme tête de liste aux
européennes de l’année prochaine de peur de se prendre une claque…
N’ayant donc aucune chance de gagner la mairie de Paris,
l’UDI a investi un obscur candidat parfait pour la conduire à l’échec,
Christian Saint-Etienne, dont les interventions médiatiques auront vite fait de
convaincre les parisiens qu’il n’est là que pour faire représentation.
Jean-Louis Borloo rappelle sans cesse que son but est de
faire de l’UDI le premier parti de France devant l’UMP et le PS ainsi que
d’occuper le pouvoir le plus tôt possible (n’avait-il pas prédit des élections
législatives anticipées pour le début de cette année et la victoire de sa
formation?!).
Mais en faisant de l’UDI un parti attrape-tout au-delà de
toute logique politique, en agrégeant ensemble des formations qui n’ont rien à
voir entre elles, il la fragilise avant même de l’avoir consolidée.
De même, en jouant l’hyper-prudence de ne se présenter
qu’aux élections que l’on peut gagner et de se mettre sous l’aile protectrice
de l’UMP dans les autres cas, il condamne l’UDI à n’être qu’une force d’appoint
au parti de droite.
Quant au projet de l’UDI, il se perd dans les oppositions
entre des visions politiques différentes voire opposées. Un projet confié à
Jean-Christophe Fromantin qui affirme haut et fort ne pas partager pas les
mêmes valeurs que Jean-Louis Borloo…
Ce dernier a, en plus, multiplier des interventions pour le
moins étonnantes, comme la présentation de ce programme qui devait permettre
tous les partis de s’unir pour voter les mesures indispensables afin que la
France ne sombre pas et qui s’est perdu dans les limbes, défendu du bout des
lèvres par son initiateur dès qu’il a vu son peu de résonnance médiatique.
Ou de la mise en place de ce contre-gouvernement confié à
Yves Jégo et largement ignoré des journalistes jusqu’à présent. Sans doute
parce l’UDI ne représente au mieux que 7% d’intentions de vote dans les
sondages…
Jean-Louis Borloo doit certainement certaines explications
(dont une sur la présence du CNI de Bourdouleix dans la confédération) à ses
troupes quelque peu désorientées.
L’année prochaine, en cas d’échecs électoraux qui se
profilent si l’on en croit les sondages, il les devra aux électeurs centristes.
Espérons pour le Centre que les partis centristes de l’UDI
seront capables d’inverser la trajectoire.
Car le Centre a besoin d’un parti fort, regroupant ses
diverses tendances. Et au lieu de confier son avenir à une personnalité qui n’a
jamais été centriste, celle-ci ferait bien de prendre leur destin en main.
Disons-le encore une fois, la France a besoin d’un parti
centriste rassembleur. Un vrai.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC