Dans cette rubrique, nous publions les points
de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du
CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser
la pensée centriste.
Jacques Rollet, chroniqueur régulier sur Le
Centrisme est politologue, auteur de plusieurs livres dont Tocqueville
(Montchrestien 1998), Religion et politique (Grasset 2001), La tentation
relativiste, DDB, 2004), Le libéralisme et ses ennemis (DDB, septembre 2011).
Cette déclaration souvent entendue à propos de
problèmes de la vie quotidienne, peut s’appliquer au Centre et aux partis
centristes. Il est toujours aussi difficile d’identifier leur doctrine ou si
l’on préfère la formule, leur idéologie. Les déclarations de Jean-Louis Borloo
lors du premier Conseil national de l’UDI ne répondent pas à notre question.
Parler de dialogue, de travail en réseau est susceptible d’être approuvé par
tous les partis ou presque; cela ne constitue pas une identité. J’ai déjà posé
cette question lors de chroniques précédentes mais elle se repose plus
fortement après le vote de la loi instaurant le mariage pour les couples
homosexuels. Plusieurs députés de l’UDI
ont voté cette loi, dont le président Borloo. Il me semble problématique de
commencer ainsi l’entrée de l’UDI dans la vie politique. On pourra me rétorquer
qu’en matière de questions dites «de société», le vote est libre. Cela signifie
d’abord que pour les autres questions, le vote n’est pas libre ce qui déroge à
l’article 27 de la Constitution qui stipule que «le vote des membres du
parlement est personnel». Il devrait toujours l’être! Mais les questions de
société posent un problème d’une nature particulière. Il s’agit de savoir si
nous partageons dans une même société, une anthropologie commune. Si la vie est
une valeur fondamentale, peut-on considérer que l’avortement est un acte banal
remboursable par le Sécurité sociale? Or c’est le cas! La loi Veil de 1975
parlait dans son exposé des motifs de cas de détresse. Elle n’entendait que
l’avortement soit banalisé. Il y a environ 250.000 avortements en France chaque
année. La loi n’a rien résolu sauf qu’elle a dépénalisé l’acte.
De même, la loi récente travestit le mariage
qui a toujours été l’union d’un homme et d’une femme constituant alors une
cellule de la société qui se renouvelle ainsi par la naissance d’enfants. Deux
hommes ensemble ou deux femmes ensemble ne feront jamais un enfant par les
voies naturelles! Le sens commun ou la common decency d’Orwell nous
l’enseignent. Or c’est bien le sens commun qui est nié par le parlement. La
tradition centriste ne peut accepter cela sans ruiner de l’intérieur ce qui l’a
constituée, à savoir la démocratie chrétienne. On peut tourner le problème dans
tous les sens, on ne pourra pas l’évacuer. Un Centre qui n’est pas basé sur
l’idée qu’une morale commune doit régir une société, quand les questions
traitées touchent à l’anthropologie est un Centre qui est déjà mort. A ce sujet
on doit interroger les familles qui composent la Franc-maçonnerie dont des
membres sont présents dans le personnel politique du Centre. A trop jouer avec
le feu, celle-ci pourrait tuer l’humanisme dont elle se réclame.
Au moment où l’enquête sur les valeurs en Europe est
publiée dans Le Monde du 19 juin et où il apparaît que la France se caractérise
par un taux d’individualisation de 67% contre 52% en Allemagne, 54% en
Grande-Bretagne et 24% en Italie, il serait temps de se demander si ce n’est
pas la cohésion sociale qui est atteinte par ce relativisme généralisé dans
notre pays. (l’individualisation est repérée par des indicateurs qui se
rapportent à la volonté d’autonomie comme affirmation de liberté personnelles
et de relativisme). Comment peut-on en appeler à la solidarité comme le font
les socialistes et les Verts quand on prône le primat absolu du désir individuel
dans la vie sexuelle? La contradiction est flagrante et je me demande comment
les centristes ne s’en rendent pas compté. Pourquoi ne pas adhérer à un parti
de Gauche dans ce cas? La question est posée à l’UDI et à une partie de l’UMP.
Manifestement, on a un problème
Jacques Rollet