Le «mariage pour tous» va être voté et, le 2 février,
l’Assemblée nationale a déjà adopté par 249 voix contre 97, le premier article
de la loi qui va l’autoriser.
Dans le camp centriste, divisé comme celui de la Droite et
de la Gauche, certains ont décidé d’apporter leur soutien à cette loi, d’autres
s’abstiendront et d’autres, encore, s’y opposeront.
C’est pourquoi, nous aimerions rappeler, sans polémiques et
noms d’oiseaux, quelle est la position du Centrisme afin que l’on comprenne
mieux quel est, pour notre famille de pensée, l’enjeu dans ce débat qui dépasse
de loin la seule question du mariage homosexuel et de l’adoption des enfants
par des couples de même sexe.
De par son humanisme intégral, le Centrisme accorde la
priorité à la personne et à son intégrité, dans le respect absolu qui lui est
dû, ce qui nous place, en l’occurrence, du côté des défenseurs des enfants.
Or donc, les homosexuels sont contents. Avec l’adoption de
cette loi, ils deviennent de plus en plus «normaux», ce qui est leur lutte
principale depuis plus d’une décennie après avoir enfin réussi à la fin du XX°
siècle à ne plus être des parias de la société (même si l’homophobie n’a
malheureusement pas disparu).
Pouvoir se marier aurait sans doute été une revendication
qui aurait fait sourire les activistes gays des années 1960-1970, alors qu’ils
réclamaient, eux, leur «droit à la différence» dans le respect même de cette
différence.
A chaque époque, ses priorités…
C’est comme pour les enfants.
En ces années 1960-1970, dans le même temps, les défenseurs
des enfants se battaient de leur côté afin que l’enfant soit reconnu comme une
personne à part entière et non comme la propriété des adultes. C’était le temps
des luttes des droits de l’enfant qui a abouti, vingt ans plus tard, en 1989, à
une Convention internationale dont la France est signataire.
Pourtant, le revoilà, en ce deuxième millénaire, à nouveau
objet des adultes, plus seulement par la loi mais surtout face au désir des
grandes personnes avec ce fameux «droit à l’enfant» (revendiqué par les couples
hétérosexuels et homosexuels ainsi que par les célibataires), dans la foulée du
développement de tous les «droits à».
Et dans ces derniers, on trouve, entre autres, la
possibilité d’adoption par des homosexuels.
Et les défenseurs des enfants de s’inquiéter.
Peut-être à tort.
Mais, au jour d’aujourd’hui, aucune étude sérieuse ne prouve
quoi que ce soit.
Donc nous ne savons pas s’il existe ou non un risque psychologique
pour les enfants qui ont des parents de même sexe.
Par conséquent, il se peut que des enfants soient victimes
de cette situation. Dès lors, cette mesure est, en l’état, potentiellement
dangereuse (c’est le principe de précaution que certains, comme les Verts,
veulent appliquer à n’importe quoi mais bizarrement pas à ce cas là…).
Mais, répondrons les tenants du mariage pour tous,
croyez-vous que tous les enfants de couples hétéros, eux, sont heureux et bien
traités?
Bien sûr que non. Reste que ce n’est pas la loi qui a
consacré la famille hétérosexuelle (un père et une mère, seuls capables
d’enfanter ensemble), c’est la nature.
Oui, celle-ci est cruelle et injuste.
Elle peut l’être pour des enfants violentés et maltraités
par leurs parents «naturels» (d’où la nécessité de les protéger du mieux
possible) et pour certains qui souhaitent devenir parents et qui ne le peuvent
pas.
Mais nous devons faire avec.
Le problème dans ce «mariage pour tous», c’est que la
possible injustice que l’on crée (au nom de la «justice» et de l’«égalité» pour
ceux qui sont victimes de l’injustice de la nature), celle qui risque de
toucher les enfants, va venir de la main des parlementaires. C’est donc une loi
qui en sera à l’origine, c’est-à-dire qu’elle n’a évidemment rien d’inévitable,
que c’est un choix de société idéologique.
Poursuivons en posant le plus clairement possible les termes
du débat:
Est-ce que n’importe quel homme peut être un bon père? Oui
Est-ce que n’importe quelle femme peut être une bonne mère?
Oui
Est-ce que deux hommes ensemble ou deux femmes ensemble
peuvent être des bons parents? Oui
Est-ce qu’il y a des enfants vivant avec des parents
homosexuels qui sont heureux? Oui, certainement.
En outre:
Est-ce que l’homosexualité est aussi «naturelle» que
l’hétérosexualité? Oui puisqu’elle existe depuis que le monde est monde.
Mais, de même, depuis que le monde est monde, seule est
naturelle la naissance d’un enfant par un homme et une femme.
Est-ce que le mariage d’un homme et d’une femme est un
pilier de la civilisation occidentale? Non et il ne l’a jamais été.
Est-ce que le mariage homosexuel (sans l’adoption) remet en
cause cette même civilisation occidentale? Non car les valeurs de cette
civilisation sont autrement plus importantes qu’un contrat passé devant une
autorité municipale.
Est-ce que l’adoption par des couples homosexuels est une
mesure d’égalité? Non, elle est une demande de «sur-égalité», c’est-à-dire
d’avoir un droit supérieur aux autres au nom d’un principe d’égalité détourné
(comme cela est souvent le cas pour les «droit à»).
Est-ce que l’adoption par des couples homosexuels est un
progrès comme l’explique ses partisans et que ceux qui s’y opposent sont des obscurantistes
réactionnaires? Non, parce que le concept de progrès contient l’idée d’une
amélioration positive ce qui n’est pas démontrée pour les enfants en l’espèce
et que l’obscurantisme en la matière vient du refus de prendre en compte cette
réalité.
En l’état actuel, la loi autorise-t-elle automatiquement la
demande d’adoption d’un couple marié et répondant à certains critères? Oui.
Y a-t-il un risque qu’un enfant adopté par un couple
homosexuel connaisse des problèmes psychologiques du fait de l’orientation
sexuelle de ses parents? Oui.
Dès lors, que la loi autorise deux homosexuels à s’unir ne
pose aucun problème.
En revanche, s’il doit s’agir du mariage, il faut, en
l’état, faire en sorte de ne pas lier automatiquement celui-ci et possibilité
d’adoption.
Cette position est-elle homophobe? Poser cette question
revient à se demander si ceux qui sont contre l’adoption d’enfants par des
personnes de soixante-quinze ans ou plus (en fait la loi l’interdit à partir de
la cinquantaine) au nom de la protection des enfants ne sont pas des gérontophobes!
C’est une position qui met en premier le respect de
l’enfant. Elle est seulement pro-enfant, le seule qui nous intéresse ici, nous,
centristes humanistes.
Ensuite, aux défenseurs de l’adoption pour tous de démontrer
définitivement que celle-ci ne cause de dommages à aucun enfant concerné.
Quand ce sera le cas, les défenseurs des enfants seront
heureux de se rallier à cette adoption pour tous.
Mais, aujourd’hui, nous n’en sommes pas là.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC