Le Centrisme est issu de deux courants de pensée principaux,
le libéralisme et la démocratie chrétienne. Voilà qui fait sa grande richesse ainsi
que sa double filiation humaniste.
Néanmoins, il s’agit également d’une des raisons pour
lesquelles sur un certain nombre de questions, il peut y avoir deux approches
différentes.
C’est le cas sur la controverse née actuellement du projet
de loi gouvernemental sur le mariage homosexuel et l’adoption d’enfants par ces
couples de même sexe et alors que de nombreux centristes ont manifesté le 13
janvier à Paris contre celui-ci pendant que beaucoup d’autres ont affirmé leur accord
sur son contenu.
Mais s’il y a des différentes approches centristes sur le
mariage homosexuel, il ne peut certainement pas y en avoir concernant
l’adoption d’enfants et la procréation médicale assistée sans parler des mères
porteuses.
Dans le premier cas, les différences viennent d’une part
d’une tradition libérale qui ne voit aucun inconvénient à ce qu’un mariage
civil, c’est-à-dire un contrat liant deux personnes, ait lieu entre deux
personnes du même sexe alors que, d’autre part, la tradition démocrate
chrétienne, elle, n’est évidemment pas la même puisqu’elle considère le mariage
comme un sacrement religieux (même si des communautés chrétiennes des premiers
siècles ont offert également le sacrement à l’union de deux personnes du même
sexe).
Dans le second cas, nous sommes au cœur même de la vision humaniste
commune aux traditions libérale et démocrate chrétienne.
Ici, pas question de contrat ou de sacrement mais de la
définition même de l’essence de l’humanisme et de la conception de ce qu’est un
être humain.
La règle immuable et incontournable est que l’enfant, tout
comme tout autre personne, n’est pas un objet mais un sujet.
Dans le cas de son adoption, c’est donc autour de lui et de
son bien-être qu’elle doit être organisée comme tout ce qui l’intéresse et non
de ses parents (de sexes différents ou non, d’ailleurs).
Pour être plus clair, le Centrisme considère que le droit de
l’enfant est une réalité indiscutable au même titre que le droit de tout être
humain, alors que le droit à l’enfant n’est qu’une construction idéologique
sans aucun fondement.
Il n’est pas concevable que quelqu’un puise réclamer un
droit à avoir un enfant qui, de plus, supplanterait le droit de l’enfant.
Non pas au nom d’une quelconque homophobie de circonstance
comme tente de le faire croire des activistes radicaux de la cause homosexuelle
mais de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Car ceci vaut tout autant pour un individu qu’un couple de
même sexe ou de sexe opposé (ce qui pose le problème de fond de certaines
techniques de la procréation médicale assistée, des mères porteuses et, plus
récemment encore, des «bébés médicaments» conçus pour aider un membre de leur
famille malade grâce à leurs cellules souches).
Si tel était le cas, l’enfant serait bel et bien un objet.
Ce qui, par extension et logiquement, ferait de nous tous, à
un moment ou à un autre de notre existence, des objets. Ainsi, tous les adultes
d’aujourd’hui auraient été considérés comme des objets lors de leur conception,
de leur naissance et de leur enfance.
Dans une vision uniquement utilitariste et consumériste de
la société, cette thèse de l’enfant-objet se défend mais ce n’est pas celle du
Centre qui la réfute avec force.
Dans sa vision humaniste de la société, elle est proprement
inacceptable.
Or, le gros problème de l’adoption d’un enfant par un couple
de même sexe, c’est de permettre à des adultes en mal d’enfants de devenir
parents et ce alors que rien ne permet de dire aujourd’hui que cela ne met pas
en cause l’intégrité psychologique de l’enfant adopté tout au long de son
existence comme personne.
Dès lors, on ne peut prendre ce risque au nom d’un droit qui
serait donné à quelqu’un d’autre que l’enfant, c’est-à-dire, en l’occurrence,
extérieur à celui qui en serait la victime potentielle par la survenance d’un danger
pour sa santé. En clair, on ne peut prendre le risque de mettre en danger un
enfant sous prétexte qu’un tiers aurait un droit sur lui.
A noter que les Français d’ailleurs semblent plutôt
centristes sur cette question. Selon les sondages, ils acceptent le mariage
pour les couples homosexuels et se déclarent contre l’adoption des enfants par
les mêmes couples.
Pour finir, nous reproduisons cet extrait d’un article
extrêmement pertinent («L’échec fondamental des militants des droits de l’enfant)
du blog
du défenseur infatigable des droits des enfants, Jean-Pierre Rosenczveig,
président du tribunal pour enfants de Bobigny:
«On voit aujourd’hui qu’il y avait plus grave:
fondamentalement notre pays n’a pas adhéré à cette idée que l’enfant est une
personne. Il s’apprête à démolir les références parentales des enfants; pire
encore, il se prépare à donner le feu vert à la fabrication artificielle
d’enfants par des couples qui en passeraient commande à travers ces médecins
qualifiés de ‘sorciers de la vie’ dénoncés dans les années 80. On en est revenu
purement et simplement à cette idée que l’enfant est un bien que les adultes
peuvent commander soit naturellement ou scientifiquement. Le droit à l’enfant
l’emportera sur le droit de l’enfant. D’ailleurs ne dit-on pas ‘Combien as-tu
d’enfants?’ et non pas ‘Combien de fois es-tu parent?’. Etre et avoir!»
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC