Après la tragédie de Newton aux Etats-Unis, revient en
mémoire ce que disait si justement Albert Camus: «ce n’est pas la souffrance de
l’enfant qui est révoltante en elle-même, mais le fait que cette souffrance ne
soit pas justifiée».
Celle-ci rappelle également que la place de l’enfant dans la
société est une question fondamentale.
Le Centre comme la Droite ou la Gauche prétendent s’en
préoccuper en priorité.
Le Centrisme, humanisme intégral, milite pour que cette
place soit la première et fait sienne cette évidence du grand spécialiste de
l’enfance, Jean-Pierre Rosenczveig, «c’est à la place fait aux enfants que l’on
juge une société et sa culture».
Et le constat n’est pas forcément très brillant…
Dans cette optique l’interrogation de Barack Obama devant
les parents éplorés des vingt enfants assassinés à l’école Sandy Hook de Newton
(Connecticut) est essentielle: «nous devons nous demander si nous faisons assez
pour protéger nos enfants».
Tout aussi essentielle est sa réponse: «si nous sommes
honnêtes avec nous-mêmes, la réponse est non».
Mais elle n’est pas simplement négative aux Etats-Unis, elle
l’est également dans le monde entier, un monde qui n’est souvent pas fait pour
les enfants, un monde qui souvent n’est pas accueillant pour le nouveau-né, un
monde qui préfère souvent détourner le regard devant la détresse et la douleur
des enfants, un monde qui instrumentalise les enfants, qui en fait trop souvent
des objets voire des marchandises.
Pourtant, nous affirmons tous, tous les jours, dans une
belle unanimité que les enfants sont les êtres que nous chérissons le plus et
que nous sommes prêts à tout pour leur sécurité, même à sacrifier nos vies pour
cela.
Les vingt petits enfants de six à sept ans abattus par un
jeune homme de vingt ans avec un fusil d’assaut sont là pour démontrer que nous
avons encore beaucoup de chemin à faire.
Non pas que nous puissions éviter à coup sûr ce genre de
massacre épouvantable et qui jalonne l’histoire de l’humanité comme autant
d’épisodes honteux de nos civilisations.
Mais c’est dans la réponse globale, dans les décisions
importantes que se trouve une grande partie de la solution.
L’Unicef milite ainsi pour que «l’intérêt supérieur des
enfants» soit le «critère primordial de gouvernance».
Cela supposerait une vraie révolution dans la manière d’envisager
cette gouvernance car chacun de ses aspects «peut affecter les droits de l’enfant».
L’organisation internationale poursuit en expliquant «que
les décisions concernent la fiscalité ou le commerce, la diplomatie ou
l’endettement, il n’existe pas de politique, loi, budget, programme ou plan qui
soit ‘neutre pour les enfants’. Le premier défi pour les Etats parties consiste
donc à évaluer les conséquences sur les enfants de toute la gamme de leurs
actions législatives et administratives. Le second consiste à s’assurer que les
budgets, politiques et programmes appliquent les principes de la Convention des
droits de l’enfant sous tous ses aspects. Au niveau national, les budgets et
les programmes, en particulier, devraient classer par ordre de priorité les
services qui sont essentiels pour faire respecter le droit des enfants à la
survie, au développement, à la protection et à la participation. Ces efforts devraient
permettre de mobiliser et coordonner les ressources des secteurs publics et
privés tout en surveillant la situation des droits de l’enfant à l’intérieur
des pays et des communautés.»
Ainsi, par exemple, personne ne prétend qu’Adam Lanza, dans
sa folie et sa volonté de tuer, n’aurait pu trouver les armes pour perpétrer
son acte innommable.
Cependant, si les Etats-Unis avaient des lois strictes contre
la possession d’armes, au minimum pour ce qui est des fusils d’assaut, son
dessein criminel aurait eu beaucoup plus de mal à se concrétiser.
A la lumière de ce que l’on vient de dire, la réponse à la
question «faisons-nous assez pour protéger nos enfants», est évidemment non, si
nous sommes honnêtes avec nous-mêmes…
Si le martyr de ces vingt petits enfants pouvait servir à ce
que les adultes agissent en personnes responsables et non en êtres totalement
incapables de faire face aux grands défis de l’humanité, alors ils ne seraient
pas morts en vain.
Malheureusement, même si une prise de conscience à l’air de
d’émerger aux Etats-Unis, il n’est nullement sûr qu’une législation restrictive
voit le jour (Barack Obama vient de se prononcer contre les ventes d’armes d’assaut,
une mesure déjà votée… en 1994 sous la présidence de Bill Clinton mais qui n’avait
pas été pérennisée par le Congrès à majorité républicaine en 2004 au moment où
cette interdiction venait à expiration).
Peut-être même qu’une fois passées l’émotion, la douleur et
la rage, les défenseurs des armes à feu et leurs arguments fallacieux reprennent
du poil de la bête et s’opposent avec succès à toute règlementation.
Souvent, lorsque les adultes sont des irresponsables, on dit
qu’ils agissent comme des enfants.
C’est, à la fois, insultant et, surtout, faux.
Car les enfants ont cet amour et cette empathie vis-à-vis
des autres qui feraient que, s’ils avaient le pouvoir, les armes, toutes les
armes, seraient supprimées immédiatement.
Alors, nous les adultes, quand allons-nous agir comme des
enfants?!
Alexandre Vatimbella