Norman Ornstein était de passage à Paris pour donner une
conférence sur les prochaines élections présidentielles pour la French American
foundation.
Le politologue et chercheur à l’American Entreprise
Insitute, think tank conservateur, est, notamment l’auteur avec Thomas E. Mann
d’un best-seller actuel «It’s Even Wors Than It Looks: How The American Constitutional
System Collided With The New Politics Of Extremism» («C’est encore pire que ce
que vous pensez: le conflit entre le régime constitutionnel américain et les
nouvelles politiques extrémistes»).
Situé au centre-droit, Ornstein a été récemment l’objet d’attaques
très dures de la part des républicains après la parution de son livre, le chef
de la minorité républicain au Sénat, Mitch McConnell allant même jusqu’à le
traiter d’«ultra-ultra-ultra liberal»!
Il faut dire que le politologue n’y va pas avec le dos de la
cuillère pour qualifier le virage à droite toute du Parti républicain ces
dernières années.
Ainsi, il n’hésite pas à avancer que «le Parti républicain n’est
plus conservateur, il est radical. Il ne rejette pas seulement Franklin
Roosevelt (président démocrate, liberal, auteur du New deal) mais également
Theodore Roosevelt (président républicain, conservateur progressiste auteur du
Square deal», cousin du premier nommé).
Et de préciser que «si le Parti démocrate va de la gauche en
centre-gauche, le Parti républicain est désormais totalement à droite».
Car, selon lui, si «la politique américaine est aussi
divisée», c’est en grande partie la faute des républicains qui se sont
droitisés à outrance ces dernières années, ce qui a fait dire à Jeff Bush,
ancien gouverneur de la Floride, frère de George W Bush et fils de George H. Bush,
que ce dernier ainsi que Reagan n’auraient plus aucune chance d’être nommés
aujourd’hui leur candidat à la présidentielle.
Une des personnalités républicaines exemplaire de cette
radicalisation sans fin et destructrice du fameux consensus américain est le
précité Mitch McConnell, celui-ci ayant déclaré que son objectif était de
faire, quoiqu’il arrive, de Barack Obama un «one term president» (président d’un
seul mandat) et, pour cela, a fait en sorte de toujours prendre le contrepied du
positionnement du président américain, l’obligeant même parfois à changer
diamétralement d’opinion!
Un exemple? Mc Connell fut un des initiateurs d’une
commission bipartisane du Congrès qui devait se pencher sur la réduction des
déficits publics et qui reçut ensuite l’approbation du président ce qui fit, in
fine, qu’il vota contre sa mise en place et qu’elle ne fut jamais créée…
On en est arrivé à ce que le Parti républicain ne supporte
des mesures que si elles sont bonnes pour lui (en termes électoraux) et non
bonnes pour les Etats-Unis, se désolent Norman Ornstein.
En outre, il pense que si le parti perd les présidentielles,
il y aura une volonté de la part des extrémistes de se battre encore plus pour
avoir, en 2017, un candidat à leur image et non un nouveau Mitt Romney qui n’a
fait que se positionner sur leurs thèses sans réellement les partager.
Un réquisitoire sans concession mais aussi argumenté et une
analyse pointue.
Pour autant, le politologue proche des républicains n’est
pas totalement pessimiste sur l’avenir à court et moyen terme du parti.
Ainsi, il estime qu’il reste encore, à l’intérieur de ce
dernier, des personnalités qui sont assez modérés et capables de mener une
politique bipartisane quand il le faut, aux premiers rangs desquels il place l’ancien
gouverneur de Floride, Jeff Bush, et le gouverneur actuel de l’Indiana, Mitch
Daniels, deux hommes qui ont refusé de se présenter à la primaire républicaine
cette année ou encore l’étoile montante afro-américaine, Mia Love, qui a fait
un discours apprécié lors de la Convention républicaine de Tampa (Floride).
Alexandre Vatimbella