Selon la cinquième vague de l’étude mensuelle «Présidoscopie» du Cevipof et de l’Ifop (1), François Bayrou n’a plus aucune chance de se retrouver au second tour de la présidentielle. Mais le leader du Mouvement démocrate est d’un avis contraire malgré la situation qui lui est de plus en plus défavorable.
Lui qui critique constamment les sondages, s’est accroché un temps à celui réalisé par l’institut LH2 qui le faisait progresser de deux points et lui permettait, pour la première fois, d’être à égalité avec Marine Le Pen mais toujours très loin de Nicolas Sarkozy et de François Hollande. Il pouvait alors dire «c’est en train de se faire».
Un sondage qui fait figure d’exception pour l’instant puisqu’immédiatement contredit par un autre réalisé au cours de la même période par BVA qui le donne toujours à la quatrième place avec une perte d’un point.
Même sa popularité ne lui sert pas à grand-chose. Ainsi, un sondage Viavoice pour Libération (2) indique que seuls 25% des Français souhaitent la victoire du leader du Mouvement démocrate contre 70% qui ne veulent pas le voir à l’Elysée.
Pourtant, François Bayrou est sûr que son moment va venir et qu’il est le seul capable de battre François Hollande lors du deuxième tour, ce qui est devenu un leitmotiv majeur de sa campagne (il parle de «sondages» qui le donneraient vainqueur au deuxième tour face au candidat socialiste alors qu’il ne s’agit que de préférences entre les deux hommes et non d’intentions de vote).
Il table d’abord sur une «lassitude» du couple «Sarkozy-Hollande» dans l’opinion puis sur un effondrement de Nicolas Sarkozy auprès de l’électorat modéré avant le premier tour et enfin d’un réflexe conservateur des Français apeurés par les propositions de François Hollande lors du second tour. Cela fait beaucoup de coups de pouce du destin alors que pas un seul n’a eu lieu jusqu’à présent, à moins de deux mois du premier tour de la présidentielle.
Ses derniers appels du pied aux centristes du Nouveau centre dont il n’arrive pour l’instant qu’à débaucher des seconds couteaux ou à Dominique de Villepin sont destinés à essayer de lui donner la crédibilité nécessaire en le montrant en homme de rassemblement, ce qu’il n’est pas actuellement et qui constitue un de ses plus gros handicaps.
L’analyse du Cevipof et de l’Ifop affirme tout le contraire du «storytelling» bayrouiste. Elle dit le pourquoi du changement d’opinion de certains de ceux qui voulaient voter Bayrou sans pour autant expliquer ce qui, dans la campagne du candidat du MoDem, conduit à cet échec qui se profile.
Selon les spécialistes du Cevipof et de l’Ifop, François Bayrou est victime du «vote utile» dont l’effet est «dévastateur» pour sa candidature.
Ainsi, «le retour (ndlr: des électeurs qui l’ont quitté) vers François Bayrou apparaît peu probable. Les craintes de victoire du camp d'en face sont trop importantes pour éparpiller ses voix» à gauche et à droite.
Qui plus est les électeurs indiquent leur incapacité à réellement situer politiquement le leader du Mouvement démocrate, au départ proche de la Gauche, disputant la place de finaliste à François Hollande, avant de changer son fusil d’épaule et d’être plus proche de la Droite, disputant cette même place à Nicolas Sarkozy. Son changement de stratégie au milieu de la campagne fait que les électeurs de droite le voient comme un traitre à la cause et les électeurs de gauche comme un opportuniste. Là aussi, l’effet est dévastateur…
Alexandre Vatimbella
(1) Etude Cevipof-Ifop réalisée du 16 au 21 février auprès d'un échantillon représentatif de 4.728 personnes âgées de 18 ans et plus / méthode des quotas / marge d’erreur de 3 points
(2) Sondage Viavoice réalisé par téléphone les 1er et 2 mars auprès d'un échantillon représentatif de 1.001 personnes âgées de 18 ans et plus / méthode des quotas / marge d’erreur de 3 points