Le premier débat de la présidentielle américaine a,
parait-il, été remporté par Mitt Romney, le candidat d’un parti républicain
très à droite.
Pour ceux qui aiment le fond et qui n’ont pas peur de
regarder cet exercice de style peu appétant (et nous recommandons à tous ceux
qui ont écrit à chaud dessus de le regarder à nouveau), ils constateront que la
performance de Mitt Romney est bien moins brillante et que la prestation de
Barack Obama bien meilleure que ce qu’ils ont écrit ou dit.
Pourquoi? Parce que le fond est bien plus profond dans les
propos d’Obama et la forme est bien plus brillante dans ceux de Romney.
Or, c’est bien le fond qui compte, in fine, en politique
même si la forme est souvent louée et particulièrement mise en avant par les
médias, notamment audiovisuels (d’autant plus, dans ce cas précis, qu’il leur
faut «vendre» à tout prix la présidentielle comme n’importe quel divertissement
à suspens afin de faire un maximum de taux d’audience et donc, en l’occurrence,
de saluer plus que de mesure la bonne prestation du challenger qui était
distancé dans les sondages permettant de relancer le plus possible l’incertitude
du résultat).
Plus profondément, nous avons assisté à une des difficultés
que nous avons souvent pointées: la position centriste est toujours beaucoup
plus ardue à expliquer et à défendre dans ce genre d’exercice où les opinions
tranchées sont plus «percutantes» et où on se trouve attaqué par la Droite et
la Gauche.
Si l’on regarde les réactions à la prestation d’Obama, tout
y est.
Il a été trop professoral, disent les «pundits» (experts
médiatiques) parce qu’il a essayé d’aller au fond des problèmes.
Il a eu l’air de s’embêter, disent les commentateurs, parce
qu’il a essayé de ne pas sacrifier le fond pour la forme.
Il n’a pas assez fait de «rentre dedans» vis-à-vis de Romney
disent les conseillers en communication (et les démocrates de gauche), parce
qu’il n’a pas joué au radical, lui qui a toujours privilégié la discussion, la
persuasion et le consensus.
Il n’a pas simplifié ses positions en petites phrases qui
sont souvent aussi brillantes que creuses, disent-ils tous, parce qu’il a
toujours cru que les Américains comprennent quand on leur parle sérieusement et
en adultes responsables.
Sans oublier deux autres caractéristiques, l’une
particulière à ce débat, l’autre à tous les exercices du même style.
D’abord, Mitt Romney a recentré ses positions et s’est une
nouvelle fois contredit par rapport à ses discours de droite radicaux, ce qui a
été malheureusement «oublié» par la plupart des analystes (on verra si c’est le
cas des plus à droite des républicains!).
Du coup, Barack Obama avait devant lui, d’un certain côté,
un débatteur qui disait le contraire de ce qu’affirme le candidat, un exercice
de style toujours difficile car si on se focalise sur cette supercherie, on
devient vite celui qui agresse, ce qui est toujours mauvais en terme d’image.
Ensuite, Mitt Romney, en tant que challenger n’avait pas à
défendre un bilan ce qui est toujours plus facile car, sur quatre ans de
gouvernance, on peut attaquer bien des points qui font controverse ou qui
semblent être des faiblesses de son adversaire qui, lui, a été constamment au
charbon.
Nous verrons si Barack Obama change de tactique pour les
prochains débats et ce qu’il dira de celui qui vient de se dérouler lors de ses
prochaines réunions électorales.
Quoiqu’il en soit, il faut bien comprendre qui est le vrai
Barack Obama, celui qui se raconte dans ses livres, celui qui explique ce qu’il
veut faire dans ses discours depuis dix ans, celui qui agit depuis quatre ans à
la tête des Etats-Unis.
On peut le critiquer pour ce qu’il est ou pour ce qu’il fait
mais pas pour ses convictions.
Il est profondément centriste et n’a jamais varié de ce
positionnement qui est, pour lui, fondamental, afin de gouverner et réaliser
son objectif, permettre à son pays de demeurer puissant et fort au cours du
XXI° siècle grâce à un gouvernement bipartisan, c’est-à-dire dont les majorités
sont fluctuantes au gré des questions abordées en non polarisées uniquement par
l’appartenance à un parti ou à un autre au mépris des intérêts nationaux.
Pour terminer, on ne peut que se féliciter du recentrage de
Mitt Romney… s’il est réel.
On évaluera son degré de sincérité dans les prochains jours
et les prochaines semaines lorsqu’il va devoir s’en expliquer devant la base
républicaine fortement teintée par les positions de droite extrême du Tea
party, elle qui ne l’aime pas et se méfie de lui.
Peut-être que nous aurons là une nouvelle preuve de la
difficulté d’être centriste!
Alexandre Vatimbella