Le temps du recentrage est venu pour Mitt Romney s’il veut
avoir une chance de remporter les élections présidentielles américaines du 6
novembre prochain.
Le candidat républicain qui sera intronisé dans quelques
semaines lors de la convention de son parti en Floride a ses chances puisqu’il
fait jeu égal dans les sondages actuellement et, surtout, qu’il est considéré
comme plus crédible sur l’économie que son adversaire démocrate, le président
sortant, Barack Obama.
Bien sûr, des sondages aussi éloignés du vote ne signifient
pas autre chose qu’une photographie à un moment donné (le dernier en date
donnant Obama vainqueur de peu), d’autant que ce moment vient alors que Romney
est sous le feu de l’actualité après sa nomination de fait comme candidat
officiel des républicains, ce qui lui donne automatiquement un coup de pouce
dans les enquêtes d’opinion, coup de pouce qui ne dure généralement pas.
Et puis, pour avoir vraiment des chances de devenir les 45°
président des Etats-Unis, il va devoir séduire deux électorats essentiels: les
femmes et les «independents» modérés et centristes.
En ce qui concerne l’électorat féminin, Mitt Romney va avoir
une tâche rude depuis qu’il a fait sienne les positions les plus rétrogrades
des républicains de la droite extrême sur la contraception et sur le droit de
disposer de son corps (en particulier sur l’avortement) sans oublier sur le
rôle de la femme dans la société (son épouse n’a jamais travaillé même si elle
a élevé ses cinq enfants).
Pour l’instant, il accuse un sérieux retard quant aux
intentions de vote des femmes.
En ce qui concerne les «independents», ceux qui déclarent être
proches ni des démocrates, ni des républicains, Mitt Romney va devoir séduire
la frange qui se déclare modérée et centriste.
Là aussi, il part avec le handicap de toutes ses
déclarations récentes lors des primaires de son parti où il a du droitiser,
parfois jusqu’à la caricature, son discours afin de séduire l’électorat le plus
conservateur, le plus à droite et le plus réactionnaire qui est surreprésenté
parmi les électeurs qui prennent part à la désignation du candidat républicain.
Ici, sa tâche semble plus aisée puisque Mitt Romney, avant
ce virage à 380°, était considéré comme un modéré proche du centre de
l’échiquier politique.
Son mandat de gouverneur de l’Etat du Massachussetts plaide,
en partie, pour ce positionnement modéré même si de nombreuses voix se sont
fait entendre récemment, rappelant quelques mesures peu consensuelles prises
par Romney alors.
De plus, le mot «Massachussetts» est étrangement absent des
discours de Romney…
Toujours est-il qu’il a pris le taureau par les cornes et
qu’il tente actuellement ce difficile exercice d’équilibriste qui consiste à
affirmer qu’il garde le cap du conservatisme dur tout en faisant des clins
d’œil appuyés à l’électorat modéré.
En témoigne ses dernière déclarations affirmant que tous les
lycéens doivent pouvoir entrer à l’université de leur choix et de leurs capacités
en faisant en sorte que les bourses d’étude soient bien distribuées et assez
nombreuses.
Une de ses autres approches consiste à essayer de séduire
les «independents» mais aussi ces électeurs démocrates ouvriers et employés qui
ont voté pour Bill Clinton lors de ses deux mandats à la Maison blanche et pour
Hillary Clinton lors des primaires démocrates de 2008 et qui ont peu d’atomes
crochus avec Obama.
Pour cela, il s’appuie sur les résultats de Bill Clinton
alors que celui-ci est un soutien sans faille de Barack Obama!
Evidemment, cette approche est validée part les politologues
du Parti républicain alors que ceux du Parti démocrate n’y voient qu’un stratagème
un peu grossier.
En tout cas, tout cela n’a pas échappé à Bill Clinton qui a
répondu à Romney en utilisant la fameuse gaffe d’un de ses conseillers.
Ce dernier avait utilisé le Télécran (Etch a Sketch en
anglais), cet écran de sable inventé par le Français André Cassagnes où l’on
peut dessiner grâce à deux boutons puis effacer sa création pour en recommencer
une autre pour qualifier la stratégie électorale de son patron.
Eric Fehrnstrom, c’est son nom, avait ainsi déclaré qu’une
fois la nomination républicaine dans la poche, Mitt Romney effacerait tout ce
qu’il avait dit lors des primaires et que ce serait un nouveau départ pour sa
campagne (sous-entendu, il montrera alors son vrai visage de modéré).
Cette déclaration avait évidemment provoqué l’ire de ses
adversaires républicains lors de ces primaires qui y voyaient la preuve que le
discours radical adopté par ce dernier n’était qu’un simulacre.
Une manière de dire, pour Bill Clinton, que l’on ne peut
évidemment pas prêter crédit aux propos de l’ancien gouverneur du
Massachussetts, que ce soit dans un sens ou dans l’autre…
Alexandre Vatimbella