On voit apparaître une des stratégies principales de Barack
Obama pour les élections présidentielles du 6 mai.
Il s’agit de ringardiser le plus possible Mitt Romney et de
le repousser le plus loin possible dans le camp de la réaction dure, afin de
faire de lui un nouveau Barry Goldwater, le candidat le plus à droite que
présenta le Parti républicain à une élection présidentielle, héros de Ronald
Reagan, et qui fut balayé par Lyndon Johnson en 1964.
Après l’avoir attaqué sur ses positions économiques qu’il a
comparé à celles du Tea Party, c’est-à-dire, selon lui, qui aboutiront à faire
payer à la classe moyenne les problèmes économiques, à couper encore plus dans
les programmes sociaux, à abandonner les programmes environnementaux et,
surtout, à donner encore plus d’avantages aux riches (dont fait partie Romney),
Barack Obama a enfoncé le clou en matière sociétale.
Ainsi, après les bourdes à répétition de Mitt Romney sur le
droit des femmes à disposer de leur corps et à utiliser la contraception qui
lui valent un retard conséquent dans les sondages du côté des électrices,
Barack Obama a décidé de se déclarer pour la première fois en faveur du mariage
entre homosexuels ce qui, évidemment, a entraîné une réaction immédiate du
candidat républicain qui s’y est dit opposé, estimant que la question du
mariage ne concernait qu’un homme et une femme.
Voilà donc la communauté gay ancrée un peu plus du côté de
Barack Obama d’autant que Mitt Romney avait du, il y a quelques jours, viré un
de ses porte-paroles ouvertement homosexuel sous la pression de l’aide la plus
à droite de son parti.
Même si le vote gay ne fait pas gagner une élection (au
contraire du vote féminin), cela permet à Barack Obama de pousser au fur et à
mesure son adversaire dans le camp le plus réactionnaire pour en faire un
candidat clivant, aux ordres de l’extrême-droite obscurantiste et ayant renié
tous ses engagements modérés devant les diktats de cette dernière.
Dans la lettre qu’il a envoyée à ses soutiens, Barack Obama
dit avoir évolué en matière de mariage gay.
Il rappelle toutefois qu’aucune initiative fédérale ne sera
prise en la matière et que les Etats continueront à légiférer en la matière (certains
d’entre eux ont passé des lois interdisant ce mariage alors que d’autres, comme
New York, l’ont autorisé).
De même, il comprend les oppositions que cela suscite
notamment au niveau religieux.
On le voit, cette déclaration qui ne sera suivie d’aucune
mesure concrète est bien un message adressé à la communauté gay mais aussi à
tous ceux qui sont pour une société ouverte, voire une société débarrassée de
ses interdictions passéistes, tous ceux, également, qui placent la liberté
individuelle au-dessus de tout, c’est-à-dire une large majorité d’Américains.
Dans cette population, il y a évidemment la base de son
parti comme le rappellent les commentateurs mais aussi une des cibles
prioritaires d’Obama, les jeunes.
D’ailleurs, lors de son interview télévisée à la chaîne ABC
au cours de laquelle il a fait ce «coming out», il a indiqué que, lorsqu’il se
rend dans les campus universitaires, «souvent, je parle à des étudiants
républicains qui pensent que j’ai de très mauvaises politiques économique et en
matière de politique étrangère, mais sont très clair lorsqu’il s’agit de
l’égalité des homosexuels, ils croient en cette égalité».
Mais, mieux encore pour Obama, 57% des électeurs
«independents» (où on trouve les centristes), ceux qui feront l’élection, se
déclarent en faveur du mariage gay (contre 40% qui sont contre) selon un
sondage Gallup publié cette semaine.
En revanche, l’électorat noir a souvent été majoritairement
contre une telle avancée sociétale. Il fut, par exemple, déterminant pour
rejeter sa mise en place en Californie voici quelques années.
Pour autant, on ne voit pas trop comment il pourrait faire
défaut, sinon à la marge, au premier président noir des Etats-Unis.
Barney Franck, le célèbre représentant démocrate du Massachussetts
(qui ne se représentera pas en novembre prochain) et qui a été un des premiers
politiques à se déclarer ouvertement gay, estime quant à lui que ceux qui sont
contre ce mariage, de toute façon, n’auraient pas voté pour Obama, ce qui
limite les risques de cette déclaration.
Barack Obama avait décidé de rendre publique sa position sur
le mariage gay lors de la prochaine convention démocrate en Caroline du Nord
qui avalisera sa candidature pour la présidentielle comme représentant du parti
(il est le seul candidat).
Cependant, les déclarations en faveur de l’union maritale
des homosexuels de son vice-président, Joe Biden, lors de la célèbre émission
politique du dimanche, Meet the press, sur NBC, l’ont obligé à révéler sa
nouvelle position plus tôt que prévu.
A noter que la Caroline du Nord a voté majoritairement pour
Barack Obama en 2008 mais vient d’interdire à une large majorité le mariage gay…
Alexandre Vatimbella