L’élection présidentielle américaine du 6 novembre prochain
opposera-t-elle deux centristes? L’un, Mitt Romney, le républicain, serait un
centriste conservateur adepte d’une société méritocratique et d’opportunités. L’autre,
Barack Obama, le démocrate et président sortant, serait un centriste
progressiste adepte d’une société méritocratique et de promotion sociale.
Est-ce bien le cas?
Oui et non.
Oui, si l’on considère que les parcours politiques des deux
hommes. Ils ont été des modérés à la recherche du consensus.
Dans l’Etat très libéral du Massachussetts, Mitt Romney en
fut un gouverneur tout aussi libéral, tant pour ce qui est de la contraception
ou que pour la mise en place d’une assurance santé qui, d’ailleurs, fut le
modèle de celle que Barack Obama fit voter au Congrès en 2009.
Depuis son entrée en politique, Barack Obama s’est toujours
positionné au centre de l’échiquier politique, recherchant constamment des
solutions bipartisanes ou postpartisanes.
Non, si l’on considère les dernières prises de position de
Mitt Romney, celles qu’il a prises pendant la campagne des primaires
républicaines.
A cette occasion et devant un parterre de militants exaltés
et extrémistes, il a rivalisé de déclarations dures et clivantes avec ses
rivaux les plus à droite comme Rick Santorum, Newt Gingrich, Herman Cain, Ron
Paul ou Rick Perry.
Quant à Barack Obama, plusieurs commentateurs ont estimé
qu’il avait radicalisé son discours cette dernière année pour plaire à la
frange la plus à gauche du Parti démocrate en vue des élections qui se
profilent.
C’est vrai que l’on peut trouver des déclarations du
président américain un peu plus à gauche que d’habitude. Mais, sur le fond, il
est demeuré bien campé au centre au grand dam de certains de ses partisans...
Reste que nous avons affaire à deux hommes aux vraies
sensibilités centristes.
D’où d’ailleurs la difficulté qu’ils vont avoir à se
critiquer l’un, l’autre quand leurs visions sur ce qu’il faut faire se
rejoindront largement sur de nombreux problèmes qui se posent aujourd’hui à l’Amérique
comme le chômage, les déficits publics et l’éducation.
D’autant que la campagne, elle, se déroulera bien au centre.
On voit mal comment, en effet, les démocrates de gauche et
les républicains de droite pourraient faire défection au candidat de leur parti
même s’ils ne partagent pas, loin de là, toutes leurs positions. Ils pourront
évidemment tenter d’infléchir le discours de leurs hérauts mais leurs chances
de les radicaliser est minime (plus important néanmoins du côté républicain).
En ces temps d’importants clivages idéologiques entre les
deux grandes formations, on peut penser que la mobilisation de chaque camp sera
forte, au-delà des ressentiments même idéologiques.
Ce sont donc les 15% d’électeurs du Centre qui n’ont pas
encore fait leur choix définitifs et qui se considèrent comme des
«independents» (mais ne représentent qu’une frange de ceux-ci) qui seront les
faiseurs de roi.
D’où une pêche aux voix au centre d’Obama et de Romney.
On sait que l’économie sera au cœur de la campagne. Si elle
va bien ou de mieux en mieux, le président sortant en reprendra pour quatre ans
à la Maison blanche. Dans le cas contraire, Mitt Romney pourrait lui chiper la
place.
Malgré tout, d’autres considérations pourraient être
importantes. Comme, par exemple, le manque de sympathie des Américains pour
Romney et son manque d’empathie pour ces mêmes Américains.
Ainsi, le candidat républicain ne semble intéressé que par
une personne et une seule chose: lui et son destin présidentiel…
Bien sûr, pour être candidat à l’élection présidentielle
américaine, il faut avoir une certaine dose d’égocentrisme. Mais pour Romney,
cela se voit comme le nez au milieu de la figure! Ce qui gène nombre de ses
compatriotes.
Parmi les autres paramètres qui pourraient jouer un rôle
dans cette élection, il aura la présence ou non d’un troisième candidat.
On sait que des organisations comme Americans Elect 2012
essayent de mettre en place une candidature «centriste» qui pourrait siphonner
les voix démocrates et républicaines.
Pour l’instant, rien n’est encore fait de ce côté-là.
En outre, on oublie trop souvent que l’élection
présidentielle américaine, ce ne sont pas que deux candidats, ou même trois
parfois, mais plusieurs. Bien sûr, à part les deux principaux (et
éventuellement le troisième larron), ils n’ont aucune chance d’accéder à la
magistrature suprême.
En revanche, ils peuvent empêcher un des candidats
principaux de gagner. Comme ce fut le cas, par exemple, de Ralph Nader, en
2000, qui prit assez de voix à Al Gore pour que George W Bush soit élu.
Alexandre Vatimbella