Y a-t-il quelque chose qui cloche dans la campagne de Bayrou? Ou, tout simplement, est-il à sa vraie place? Le voilà en baisse dans les sondages à 10% d’intentions de vote et en cinquième position avec des Français qui ne semblent guère convaincus par sa posture de «centriste gaullien», prédisant le pire pour le pays et en appelant à un réveil de la nation équivalent à celui de 1958. Il ne parvient pas, non plus à les convaincre qu’il pourrait gouverner avec une majorité s’il était élu et son programme n’a pas suscité un grand intérêt populaire. Ce sont des faits.
De même, ses bons scores dans les baromètres de popularité ne se traduisent pas en volonté de voter pour lui, comme si les sondés faisaient une distinction entre l’homme et le politique, le préférant dans un registre «d’autorité médiatico-morale» qui a si bien réussi à l’Abbé Pierre, à Nicolas Hulot ou à Yannick Noah…
Et puis, François Bayrou a été incapable de choisir son public. Devait-il s’adresser, en plus du peuple du Centre, au peuple de Gauche ou au peuple de Droite? Il n’a pas réussi à trouver la bonne réponse et le bon tempo. Résultat, il est apparu, tout à la fois, anti-Hollande aux électeurs de gauche et anti-Sarkozy aux électeurs de droite. Du coup, il n’a pu puiser dans un de ces électorats pour créer une dynamique et espérer devenir le deuxième homme de la présidentielle. Pire, il a même rebuté des électeurs modérés de centre-gauche et de centre-droit qui ont préféré rejoindre dès le premier tour le camp des deux grands candidats.
Le malaise dans l’entourage du candidat du MoDem est de plus en plus palpable. Le spectre d’un mauvais score au premier tour n’est plus écarté d’un revers de la main. Le plus désespérant pour Bayrou, c’est que rien de bon ne devrait plus survenir en sa faveur au vu de l’encéphalogramme plat de sa campagne. Même son meeting au Zénith de Paris ne l’a pas relancé comme il l’espérait.
Bien sûr, les miracles existent même en politique. Mais ils ont souvent besoin d’un coup de pouce dont on ne voit pas, pour l’instant, d’où il pourrait venir. «Wait and see», quand même.
Et le 22 avril, il sera temps de faire le bilan au vu du résultat des urnes pour ce qui risque d’être une nouvelle claque pour les partis qui se revendiquent centristes (après la fausse candidature de Borloo, la pitoyable aventure de Morin et l’impossibilité pour Lepage de réunir les 500 signatures).
Il faudra, entre autres, se demander pourquoi la sociologie de la population française la porte vers des positions centristes et pourquoi les partis se positionnant au centre de l’échiquier politique sont incapables de les attirer.
Il faudra également se questionner sur la légitimité de François Bayrou à représenter le Centre, lui qui, déjà en 2007, avait fait une campagne assez éloigné des positions centristes. Son résultat inespéré à 18,55% lui avait permis d’occulter un débat sur ce hiatus puis de se positionner «ailleurs», à la manière d’un Michel Jobert en créant un Mouvement démocrate qui ne revendiquait guère, alors, son centrisme. Ce n’est que dans le courant de 2011 qu’il s’est, à nouveau, présenté comme le seul candidat naturel du Centre.
Oui, la post-campagne présidentielle devra être un moment d’introspection centriste. Pour que le temps des échecs cesse.
Alexandre Vatimbella