vendredi 25 février 2011

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Aide-toi et les démocrates du monde entier t’aideront


Il est toujours difficile de parler au nom des peuples. Notamment lorsque ceux-ci sont opprimés par leurs propres gouvernants. Depuis longtemps, on dévisse ici et là de ce que veulent certains d’entre eux. En particulier ceux des pays arabes.
Pour certains, ces peuples seraient apathiques et soumis. Ils ne méritaient donc pas la démocratie et la liberté qui va avec. La preuve? Ils ne faisaient rien, jusqu’à maintenant, pour conquérir cette dernière et s’en remettaient à des despotes pour les gouverner ou, pire, à des fondamentalistes religieux encore plus dangereux pour eux et pour le monde.
On disait un peu la même chose (les religieux en moins) des peuples slaves voici encore peu lorsque le joug de l’Union Soviétique s’était abattu sur l’Europe centrale. Et l’on dit que c’est le cas pour les peuples asiatiques qui n’ont pas la même culture démocratique que les Occidentaux. Sans parler des peuples africains dévoués à des chefs et incapables d’avoir la discipline qui va avec la liberté.
Ces idées reçues et souvent condescendantes si ce n’est insultantes pour ces peuples qui souffrent sous la main de fer de régimes autoritaires et violents sont en train de voler en éclats dans les pays arabes.
C’est une très bonne nouvelle. Pour eux. Pour le monde entier.
D’autant que ces peuples n’ont pas été libérés de l’extérieur mais ont démontré quelle valeur ils attachent à cette liberté qui fait partie de l’essence même de tout être humain avant que des cultures et, plus souvent, un ordre violent ne la lui dénie au nom de soi-disant particularismes locaux.
Oui, la liberté est universelle en tant qu’elle ne peut être refusée à un peuple sous quelque prétexte que ce soit. Mais cette liberté doit être conquise par ceux qui en sont privés, comme ce fut le cas des Anglais face au roi, des Américains face au colonialisme et des Français face à la monarchie absolue. Il faut que les peuples disent au monde qu’ils souhaitent ardemment cette liberté et qu’ils le démontrent. La liberté a un prix qu’il faut payer.
Dès lors que l’on commence à s’acquitter de celui-ci (sans oublier qu’il faudra payer encore et toujours), les démocraties et les démocrates du monde entier ont une obligation éthique d’intervenir aux côtés des peuples qui luttent pour leur liberté et leurs droits démocratiques. Aucun raison d’Etat supérieure ne peut être invoquée pour en priver une population ou pour détourner les yeux.
Bien entendu, nous ne savons pas encore comment vont se terminer les mouvements qui ont embrasé et continuent d’embraser le monde arabe. Des ennemis de la liberté demeurent tapis dans l’ombre et attendent le bon moment pour confisquer la lutte des peuples pour leur émancipation et instaurer des régimes répressifs et brutaux.
Là, encore, le monde démocratique a un devoir moral d’intervention et doit répondre à l’appel à l’aide des mouvements de libération et de leurs combattants sauf à devenir les complices d’un futur régime autocratique comme cela a déjà eu lieu en Iran et dans de nombreux pays africains.
Enfin, il faut espérer que les révolutions arabes tuent définitivement ce fameux et repoussant «consensus de Pékin» qui permet d’affirmer que la liberté et le développement économique ne vont pas de pair. Surtout, qu’un peuple peut se satisfaire d’un certain confort matériel et renoncer à sa liberté. Rien ne permet de le dire. Même en Chine. Même dans une économie dont la croissance est de 10% par an. Car l’être humain n’est pas réductible à un consommateur. Et c’est tant mieux.