A l’ère de la mondialisation où nous savons que l’Europe sera notre salut, il peut être paradoxal de faire du slogan «acheter français» un des principaux de sa campagne. Surtout lorsque l’on se revendique comme un centriste pro-européen.
Bien sûr, comme l’a rappelé François Bayrou, il ne peut s’agir que d’une «recommandation» aux Français puisque notre adhésion à l’OMC (Organisation mondiale du commerce) et à l’Union européenne nous empêche, de toute façon, de donner un cadre juridique à cette préférence pour les produits nationaux.
Mais cette recommandation est-elle sensée? La France est aujourd’hui, et malgré la dégradation de sa situation ces dernières années, la sixième puissance exportatrice derrière la Chine, l’Allemagne, les Etats-Unis ou le Japon mais devant le Royaume Uni, l’Italie, l’Inde ou le Brésil. Nos ventes à l’étranger représentent 521 milliards de dollars, soit 3,4% des échanges mondiaux (chiffres 2010).
Sans oublier que dans beaucoup de produits vendus en France sous le label d’autres pays (notamment la Chine), se trouvent de nombreux composants fabriqués chez nous et qui font vivre de très nombreuses entreprises et qui donnent de l’emploi à beaucoup de nos compatriotes.
Or donc, si tous les pays se mettaient à acheter avant tout leurs propres produits au détriment des produits étrangers, la France aurait plus à perdre qu’à gagner.
Rappelons-nous de cela même si nous avons une balance commerciale de plus en plus déficitaire.
Pour autant, l’on peut, par des campagnes de communication, vanter les produits français et leurs qualités. On peut expliquer que ces produits permettent de créer des emplois en France et qu’ils ne sont pas forcément plus chers que les produits étrangers équivalents. On peut même, ainsi que le gouvernement l’a fait, créer un label comme celui qui a vu le jour en mai dernier, «origine France garantie», tout en supportant les initiatives privées telles celles sur internet qui permettent de prendre connaissance des produits fabriqués dans notre pays. Mais n’allons pas jusqu’à cette fameuse «préférence nationale» qui a été utilisée par d’autres partis pour le moins extrémistes, à gauche et à droite de l’échiquier politique…
Se refermer sur nous-mêmes dans un «splendide isolement» par des mesures protectionnistes serait, à plus ou moins brève échéance, notre perte. Si la Chine a décidé de s’ouvrir au monde, c’est que sa fermeture au monde pendant l’ère maoïste fut un fiasco total qui engendra une pauvreté immense, des famines à répétition et un retard technologique énorme.
Pour autant, nous ne devons pas nous laisser faire et accepter que certains ne jouent pas le même jeu que nous. C’est bien là que se trouve la solution et c’est dans le cadre de l’Union européenne (qui, si on la considère comme une entité unique, est la première puissance exportatrice du monde) que le combat doit être mené.
Nous avons intérêt, tout de suite (et la crise nous en donne l’occasion comme on le constate actuellement avec le projet d’un nouveau traité), à approfondir cette union par un élan fédéraliste qui seul peut nous permettre d’avoir la «taille critique» dans cette ère de mondialisation afin de peser d’un poids suffisant pour, d’une part, prendre part à cette compétition vigoureusement et, d’autre part, pour imposer des régulations absolument nécessaires afin d’éviter les abus que l’on peut constater dans des pays. La Chine, par exemple, a su profiter de son adhésion à l’OMC pour exporter à tout va, tout en mettant en place des obstacles nombreux et inacceptables pour empêcher les produits étrangers de pénétrer sur son marché intérieur en trop grand nombre et les entreprises occidentales de s’implanter sur son territoire.
Achetons français si l’on veut mais, surtout, vivons, travaillons, produisons européen. Au plus vite.
Non, «acheter français» n’est pas «un gros mot» comme le dit François Bayrou. Mais «produire européen» est bien plus joli…
Alexandre Vatimbella
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