Dans une interview au quotidien Les Echos, François Bayrou estime à nouveau qu’il est le seul candidat légitime du Centre. Il se pose également en reconstructeur du «courant central de la vie politique française». Le terme «courant central» peut paraître étrange quand on pourrait dire «Centre». Mais il s’agit, pour le leader du Mouvement démocrate, de tenter d’élargir son rayon d’action en vue de sa candidature à la présidentielle. C’est dans cette optique qu’il faut, à nouveau, comprendre son concept de «majorité centrale». Celle-ci est une nouvelle déclinaison de son union nationale de 2007 puisque, selon lui, «la majorité nouvelle dont le pays a besoin ne pourra être qu'une majorité centrale, pas la majorité d'un camp contre l'autre».
Extraits.
Le forfait de Jean-Louis Borloo est-il une bonne nouvelle pour vous?
C'est une clarification et toute clarification est utile. Il a fait le constat qu'il était impossible de prétendre incarner une alternative en restant dans la majorité et après avoir été le numéro deux du gouvernement durant quatre ans.
Voulez-vous lui tendre la main ou reprendre le travail de reconstruction du centre?
La récupération n'est pas de bon aloi et je ne la pratique pas. Mais la reconstruction du courant central de la vie politique française est nécessaire. Elle est d'ailleurs inéluctable. Elle ne peut se faire que dans la clarté et sa condition est l'indépendance. C'est la différence que j'ai eue au travers des années récentes avec les responsables des mouvements qui avaient choisi la majorité : pour eux, comme ils le disent, le centre est à droite. Pour moi, le centre est au centre. Et c'est essentiel car face à la crise la plus grave que notre pays ait connue depuis les débuts de la Ve République, la majorité nouvelle dont le pays a besoin ne pourra être qu'une majorité centrale, pas la majorité d'un camp contre l'autre.
(…)
Qu'est-ce qui vous sépare de François Hollande?
Essentiellement qu'il est le représentant du PS, et ne s'est démarqué ni du programme ni des habitudes de son mouvement. Le PS est prisonnier de beaucoup de mauvaises habitudes et de sectarismes. Il est malsain pour la France que l'UMP et le PS exercent, tout à tour, le monopole du pouvoir. Songer que le seul Parti socialiste pourrait détenir à la fois l'Elysée, le gouvernement, l'Assemblée nationale, le Sénat, la quasi totalité des régions et la grande majorité des départements et des villes, invite à y réfléchir à deux fois.
Un des enjeux de l'élection présidentielle c'est de ramener les deux partis dominants des deux dernières décennies à une cure de modestie. Et de faire sa place enfin à une logique non pas partisane mais d'intérêt national.
Par ailleurs, les promesses officielles du PS ajoutées aux promesses personnelles des candidats sont tout simplement insoutenables. Les 300.000 emplois jeunes, l'allocation autonomie pour tous les jeunes, le retour de la retraite à 60 ans, les 70.000 emplois créés dans l'Education nationale, l'augmentation des budgets, et j'en passe : je vous le dis avec certitude, cela n'est pas tenable et ne se fera pas.
(…)
Quelle est votre priorité économique?
Il faut ordonner toute la politique du pays autour de deux objectifs centraux : produire et instruire. En économie, le grand débat et le grand effort national, l'obsession nationale doit être de retrouver les chemins du produire. Et ce n'est pas l'Etat qui produira, ce sont les entreprises. On doit les aider à reconquérir les secteurs de production abandonnés. Donc leur simplifier la vie, les soutenir. On doit travailler sur la vie sociale, les relations entre syndicats et entreprises. Sur le droit du travail. Sur l'image de marque de la France.
Cessons de bercer les citoyens avec les propositions lunaires qui prétendent qu'il faut avant d'agir réformer le capitalisme international, mettre sous tutelle les banques ou sortir de l'euro. Tout cela, ce ne sont que des leurres. Les problèmes ne viennent pas d'ailleurs, ils sont chez nous: c'est chez nous qu'il faut les identifier et les corriger. D'urgence.
© Les Echos 2011
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