De nombreux élus centristes ont fait part de leur malaise devant les déclarations et les décisions du gouvernement qui se sont succédé sur l’insécurité qui seraient dues à des minorités. D’autant que, pour le Centre, un gouvernement responsable doit s’atteler à s’attaquer aux vraies priorités. Or, en matière de sécurité, ce n’est pas le cas.
Car, oui, les Français ont peur. Oui, ils comptent sur les pouvoirs publics pour les protéger et les aider. Mais ce ne sont pas de reconduite de Roms, par ailleurs européens, aux frontières ou de déchéance de la nationalité pour les meurtriers d’un membre des forces de l’ordre qu’ils demandent. Avant tout, ils veulent du travail pour eux, une société juste et un avenir pour leurs enfants.
Tous les sondages le disent. Le plus récent (TNS-SOFRES pour Le Figaro), nous apprend que les principales insécurités selon les Français sont le chômage (74%), les problèmes de financement de leurs retraites (54%), la peur de la détérioration de la qualité des soins médicaux dans les années à venir (50%), l’érosion de leur pouvoir d’achat (47%), la baisse de qualité de l’enseignement dispensé à leurs enfants (41%), la constance des inégalités sociales (41%). Bien plus loin, en simplement dixième position, vient l’insécurité à propos des biens et des personnes (26%).
La sécurité de la population doit donc être envisagée comme un tout que l’on doit prendre en compte en tant que tel et ne pas tenter de la découper artificiellement en morceaux, selon les circonstances et quand on le souhaite, ce qui permet de jouer sur des effets d’annonce à buts électoralistes. Ici, plus qu’ailleurs, c’est le principe de responsabilité que les politiques devraient appliquer. Or, il n’en est rien.
A droite, pour masquer les difficultés économiques, on s’en prend à l’étranger qui est désigné comme la cause de la plupart des difficultés, que ce soit l’étranger hors de nos frontières, avec la mondialisation, et celui de l’intérieur, avec une immigration de personnes peu recommandables. A gauche, on s’en prend également à la mondialisation à l’extérieur et à l’intérieur au système économique et aux riches dans une grande attaque du libéralisme qui serait l’unique responsable de tous les maux des Français.
Devant ces caricatures de la réalité, le Centre doit s’impliquer pour expliquer et pour proposer une politique de responsabilité qui traite les vrais problèmes de sécurité et ne s’abaisse pas à stigmatiser tel ou tel groupe social ou ethnique.
Les vrais problèmes, ce ne sont pas quelques Roms qui volent des portefeuilles ou quelques riches qui abusent du bouclier fiscal. Car si c’étaient les uniques questions à résoudre afin que les Français n’aient plus peur et se sentent en sécurité pour regarder l’avenir en confiance, elles n’auraient même pas besoin d’être réglées tellement elles seraient insignifiantes!
Il y a d’abord un état d’esprit. Un pays qui gagne ne peut être celui dont la population estime que tout va aller de plus en plus mal. De ce point de vue, les politiques doivent proposer aux Français un nouvel horizon. Celui-ci doit être expliqué clairement, que ce soit les difficultés présentes mais aussi les espoirs futurs. Ensuite, il faut mettre en place des politiques cohérentes, pragmatiques et mobilisatrices qui évoluent dans le temps et en rapport avec la situation dans les domaines économiques, sociaux et sociétaux.
En matière économique, il faut un véritable plan pour l’emploi qui prenne en compte tous les paramètres qui font que nous sommes dans un fort chômage à la fois aux raisons structurelles et conjoncturelles. Il ne faut pas sortir du chapeau une mesure ou un slogan et croire que tout se règle avec une réforme miracle. Mais il faut aussi expliquer pourquoi il faut consentir des efforts aujourd’hui pour en récolter les fruits demain.
En matière sociale, il faut redéfinir les priorités en regard des possibilités actuelles du pays et ne pas faire croire que l’on peut raser gratis tout en continuant à fermer des barbiers! Et ceci doit être fait dans le cadre d’un vrai dialogue social des deux côtés de la table de négociation où la responsabilité doit être de mise et non la démagogie.
En matière sociétale, il faut proposer la réactivation du lien social sur de nouvelles bases et avec des mesures profondes à la clé impliquant la population où respect, solidarité et tolérance doivent en être les piliers avec la liberté, le tout dans un juste équilibre harmonieux.
Evidemment, ce ne sont que des principes mais ils sont impératifs car ils impliquent deux notions qui doivent être au cœur de la gouvernance démocratique, la justice et la responsabilité. La justice pour tous, pour que personne ne soit oublié sur le chemin. Responsabilité pour tous, pour que tous participent à l’effort national afin de bâtir un meilleur vivre ensemble.
Le challenge n’est pas simple, ni facile. Mais l’insécurité ressentie par les Français est une des raisons du lent effacement de notre pays. C’est dire si ce challenge est incontournable. Et il vaut mieux que d’exciter la peur irrationnelle de l’autre.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC