Que ce soit pour sanctionner les pratiques des banques avec leurs produits financiers dérivés obscurs ou celles de BP dans ses forages à l’emporte-pièce, que ce soit pour lutter contre le chômage ou s’opposer aux velléités hégémonistes de la Chine, Barack Obama serait trop mou selon une critique qui monte de tous les bords politiques, des républicains, bien sûr, mais aussi des démocrates. Une critique reprise par une partie de la presse américaine et internationale qui n’en finit plus de vouloir s’émanciper de son adoration première et excessive pour l’homme lors de sa campagne présidentielle par un scepticisme parfois aussi excessif.
Voilà un débat qui n’est pas aussi anodin et polémique qu’il n’en a l’air au premier abord. Car, ce que l’on reproche au président américain c’est sa façon de s’attaquer et de résoudre les problèmes, sa vision politique et sa manière de gouverner. Cette manière centriste qu’il a mise en œuvre depuis sa prise de fonction il y a bientôt un an et demi et qu’il défend depuis de nombreuses années.
Une manière de gouverner qui avait été déjà vertement critiquée lors des débats sur la réforme du système de santé au moment où celle-ci semblait en perdition. Jusqu’à ce que celle-ci soit finalement votée et que Barack Obama soit célébré comme un grand stratège et un homme pugnace!
Rappelons que la méthode du président américain est celle de la discussion avec tout le monde, sans exclusive avec une recherche constante d’un consensus avant la prise de décision politique finale. Depuis qu’il est entré en politique, il a toujours défendu et appliqué cette méthode. Elle fait partie intégrante de sa manière de gouverner. Tout comme celle d’affirmer qu’une fois une décision prise, il en assume la responsabilité.
Nous sommes ici au cœur même de la méthode centriste de gouvernement, que l’on soit aux Etats-Unis, en France ou ailleurs. Sans effets de manche médiatiques, sans emphases stériles, sans faux-semblant partisans pour galvaniser les troupes, la manière centriste est souvent peu spectaculaire, préférant les résultats et le consensus à la théâtralité. Elle est donc plus facilement attaquable car elle ne remue pas les foules et elle ne propose pas de vaines gesticulations pour faire croire que l’on s’active alors que, souvent, ceux qui les pratiquent ne bougent pas le petit doigt...
Cette méthode centriste est sans aucun doute la plus responsable et la moins partisane, privilégiant l’efficacité. Mais elle impose, en contrepartie, une constante explication de texte pour faire pendant aux critiques qui la qualifie de molle et sans saveur pour démontrer la justesse de la démarche. Sans doute Barack Obama a pensé que le travail et les résultats suffiraient à assurer son succès auprès de l’opinion. Sans doute a-t-il été un peu grisé par la formidable vague d’enthousiasme qu’il a soulevé aux Etats-Unis et dans le monde entier. Une sorte d’hubris. Il a oublié qu’en politique il faut constamment vendre ce que l’on fait au risque que d’autres accaparent le discours pour dénigrer.
Mais le président des Etats-Unis n’est pas le seul centriste dans cet état d’esprit qui privilégie les résultats concrets. Dès lors, le Centre doit ne jamais oublier que ceux-ci ne sont pas suffisants pour faire taire les démagogues et leurs critiques. Il faut expliquer et réexpliquer la démarche sans relâche, dire où l’on va et communiquer quand on y arrive. On peut regretter que l’immédiateté médiatique empêche de plus en plus que la politique du moyen et long terme puisse se développer dans la tranquillité. Mais, c’est la réalité. Et les centristes, ardent défenseurs d’une politique qui s’appuie sur la réalité ferait bien de toujours s’en rappeler.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean Gripari
Directeur du département étranger du CREC