Au fond du trou après sa déroute aux élections régionales, François Bayrou a peut-être trouvé son sauveur en la personne de Nick Clegg. Le président du Parti libéral-démocrate en Grande Bretagne fait un parcours lors de la campagne des élections législatives qui ressemble à celui du leader du Mouvement démocrate en 2007 aux présidentielles françaises. Du coup, sans être sollicité, François Bayrou s’est fendu d’une interview sur le site de son parti pour parler de toute l’estime qu’il porte à Nick Clegg et combien tous les deux se ressemblent comme deux gouttes d’eau…
Vous connaissez bien Nick Clegg, nouvelle star des sondages britanniques. Que pouvez-vous en dire ?
François Bayrou. Je connais Nick Clegg depuis des années. Il a été membre du parlement européen et nous avions travaillé ensemble lorsqu'il s'est présenté à la présidence du Libdem, il y a deux ans. Il a participé à nos universités d'été, nous sommes dans une alliance, une amitié. C'est un homme ouvert, un européen convaincu qui parle plusieurs langues, dont le français. Il a des idées, du courage. Il n'hésite pas à affronter les deux autres partis pour créer un espace politique au centre. Il est centre-gauche sur les questions de société et centre-droit en économie. Il croit à la liberté de l'économie mais pense qu'on a nécessairement besoin de social, de service public et accorde une priorité à l'Education.
Que pensez-vous de sa percée dans les sondages?
C'est un renversement électoral très fort montrant que, contrairement à ce que tout le monde racontait, le peuple britannique cherche moins à donner le pouvoir aux conservateurs qu'à trouver une voie politique nouvelle après les difficultés que rencontrent les travaillistes. Nick Clegg a défendu l'idée qu'il ne fallait pas forcément choisir entre la droite et la gauche. Et d'un coup, par sa présence sur l'écran, les Britanniques ont compris que cette voie existait. Ce qui a fondé la force des libdem, c'est l'indépendance absolue. Les conservateurs leur ont offert de faire une alliance électorale et de constituer un gouvernement ensemble et Clegg a refusé de s'engager dans cette alliance en leur disant notre projet n'est pas le même.
Nick Clegg tient le même discours que vous sur un centre indépendant. Pourquoi la sauce prend-t-elle en Angleterre et pas en France?
Elle a pris à la présidentielle de 2007 et personne n'aurait dit, il y a encore quelques jours, qu'elle prendrait outre-manche. Pendant des années en France, on a raconté que la Grande-Bretagne était l'exemple même du pays avec deux partis, conservateur et travailliste, et je rappelais qu'il y en avait trois, mais que la loi électorale condamnait le centre à être dans une situation difficile.
Quand les électeurs sont placés devant le choix crucial de savoir quelle direction leur pays doit suivre, ils comprennent qu'ils ne sont pas condamnés au choix entre la droite et la gauche. L'exemple de Clegg montre à beaucoup d'électeurs en Europe et en France que le paysage politique doit nécessairement changer.