Acquérir une crédibilité en vue des élections de 2012 sera le principal défi des partis centristes français en 2010. Que ce soit le Mouvement démocrate qui ne peut plus se permettre d’être humilié à une nouvelle élection générale et qui doit donc démontrer la validité de la stratégie d’opposition systématique de François Bayrou; que ce soit le Nouveau Centre qui doit, sinon changer de nom, démontrer ad minima son originalité c’est-à-dire son utilité; que ce soit l’Alliance centriste qui doit démontrer son existence tout court;, que soient les radicaux, de droite ou de gauche, qui doivent démontrer les raisons de leur survivance dans le XXI° siècle ; que ce soit la gauche moderne qui doit démontrer s’il y a vraiment une once d’utilité à un centre-gauche dans un gouvernement de droite. Tous les partis du Centre vont jouer leur image cette année et une partie de leur raison d’exister.
Mais ce Centre fragmenté sera également l’objet de multiples pressions extérieures pour apporter sa caution et ses voix modérées à la Droite et à la Gauche. On a bien vu que les velléités d’indépendance du Nouveau Centre se sont heurtées pour l’instant à un veto de l’Elysée. C’est sans doute pourquoi Hervé Morin tient tant à reprendre le nom de l’UDF que François Bayrou ne semble pas vouloir lui céder, une affaire de gros sous et non de politique pourrait d’ailleurs en être le principal motif. Du côté du Mouvement démocrate, la stratégie à gauche de François Bayrou et son désir d’Opa sur le poste de candidat de l’opposition à la présidentielle de 2012 ne sont pas sans danger car elle risque de montrer à l’électeur, devant la force électorale des socialistes mais aussi, peut-être, de celle des écologistes s’ils confirment aux régionales leur score des européennes, qu’il vaut mieux porter sa voix à ceux qui ont un poids plutôt qu’à un outsider dont la crédibilité s’est effritée l’année dernière dans son opposition systématique non à une politique mais à un homme, Nicolas Sarkozy, dans un remake peu crédible de celle de François Mitterrand au Général de Gaulle.
Dans ce paysage, la tentative de l’Alliance centriste de rabibocher l’ensemble de la famille du Centrisme ne semble pas être la priorité des deux partis précités. Jean Arthuis a pourtant avec lui, sans doute, une majorité de militants centristes issus de l’UDF qui souhaitent une réunification sous une même bannière, à la fois, par nostalgie et par envie de pouvoir réellement peser sur la vie politique. Mais cela ne signifie pas que les machines politiques et leurs leaders aient intérêt à opérer un rapprochement autrement que par un discours unitaire sans actes concrets. Dès lors, il faudrait que l’Alliance centriste bénéficie d’une dynamique forte et d’un soutien effectif de la base centriste pour devenir une force politique assez puissante pour imposer cette réunion. Les premiers mois d’existence du parti en 2009 n’ont pas montré cette dynamique et ce soutien. Viendront-ils en 2010? Sans eux l’aventure de l’Alliance centriste pourrait être, sinon de courte durée, celle d’un groupuscule dirigée par quelques notables.
Pour la Gauche moderne, c’est sans doute cette existence groupusculaire qui lui est réservée. Le parti de Jean-Marie Bockel ne compte pour pas grand-chose politiquement et électoralement et n’a pas réussi à débaucher des socialistes modérés. Pire, les gens de gauche qui rejoignent Nicolas Sarkozy ne passent par la formation social-démocrate. Du coup, Jean-Marie Bockel ne représente quasiment que lui-même ce qui est peu pour justifier l’existence de sa formation.
Quant aux radicaux, leurs divisions sont aussi vieilles que leur existence. Pour autant, on ne sait plus très bien les raisons actuelles de celles-ci. Eux aussi, d’ailleurs. Mais le soutien du Parti radical au gouvernement est sans doute le frein principal qui empêche les Radicaux de gauche de se rapprocher de leur alter-ego. Il serait hasardeux de prétendre que 2010 changera la donne. Néanmoins, de chaque côté de la radicalité, on continuera à se faire les yeux doux… et à peser aussi peu sur la politique française!
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC