En expliquant à François Bayrou qu’il avait toute sa place dans la majorité présidentielle actuelle, Nicolas Sarkozy et Jean-Pierre Raffarin n’ont pas que déconcerté leurs amis de l’UMP mais également les membres du Nouveau Centre et du Mouvement démocrate. Car si l’UMP se cherche des alliés au centre qui peuvent séduire une partie de l’électorat de centre-gauche et écologiste, on ne voit pas très bien comment François Bayrou, au risque de perdre le peu de crédibilité politique qui lui reste ainsi que ses derniers fidèles, pourrait renier toute sa stratégie mise en place bien avant 2007 dans sa quête pour devenir président de la république.
Pour autant, l’histoire apprend que les retournements de veste sont communs en politique. Car François Bayrou doit aussi assurer son existence politique qui, aujourd’hui et pour l’instant, ne passe plus par la gauche, celle-ci n’ayant pas besoin de son apport pour conquérir le pouvoir. Du coup, le leader du Mouvement démocrate qui avait affirmé lors de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle que le mot «centre» n’avait jamais fait partie de son vocabulaire déclare désormais qu’il est au centre et que son devoir est de garantir l’indépendance de ce courant de pensée: «je suis au centre. Enraciné dans cette famille politique. Et au centre, ça veut dire indépendance. Et je suis le garant de cette indépendance». Rien de moins.
Cet appel du pied de l’Elysée à celui qui s’enorgueillissait d’être, il y a deux ans, en tête dans les sondages sur le «meilleur opposant à Nicolas Sarkozy» n’a pas du tout plu au Nouveau Centre qui sait qu’un retour à droite de François Bayrou compliquerait sa tâche pour s’imposer comme la formation naturelle de refondation des centristes. D’où des déclarations dures de François Sauvadet, président du groupe Nouveau Centre à l’Assemblée nationale: «je ne comprends ni la portée ni le sens de cet appel. C'est incroyable de penser qu'on va renforcer la majorité avec quelqu'un qui est dans l'opposition systématique depuis l'entre-deux tours de l'élection présidentielle de 2007 (…) C'est inopportun, ça apporte une grande confusion, alors que les électeurs ont besoin de clarté. Ca déstabilise ceux qui soutiennent la majorité. Ou alors c'est une manœuvre concertée de déstabilisation du Nouveau centre au moment où il se reconstitue».
Déstabilisation du Nouveau Centre, la formule est lâchée. C’est vrai que l’on peut se poser la question puisque Nicolas Sarkozy ne souhaite pas qu’il y ait une candidature de ce parti à la présidentielle. Mais l’on pourrait aussi dire la même chose vis-à-vis du Mouvement démocrate, le Président de la république cherchant à ôter le reste de crédibilité dont nous parlions à François Bayrou. Et qui pourrait alors sortir du chapeau présidentiel? Un Jean-Louis Borloo qui n’arrête pas de se tâter pour savoir s’il y va ou non, tant il devra se justifier sans relâche de n’être pas un sous-marin élyséen dans le marais centriste…
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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