Pour Le Monde, François Bayrou parie sur l’échec de Sarkozy et du Parti socialiste pour arriver au pouvoir
Dans une analyse, le quotidien Le Monde estime que la stratégie de François Bayrou, le président du Mouvement démocrate, est de parier sur l’échec, à la fois, de Nicolas Sarkozy en tant que Président de la république mais aussi du Parti socialiste, en tant que parti à proposer un nouveau projet pour parvenir à ses fins : être à l’Elysée en 2012. Mais ce double pari risque fort d’être difficile à relever. Extraits :
« Depuis sa défaite à la présidentielle, M. Bayrou, qui n'est devenu ni président de la République ni maire de Pau, rêve de prendre sa revanche en 2012. Il parie à la fois sur l'échec de M. Sarkozy et sur celui d'un PS incapable de se rénover, de se "social-démocratiser", et de se doter d'un leader. "L'objectif de François Bayrou, c'est l'explosion du Parti socialiste", a diagnostiqué Jean-Pierre Raffarin. La difficulté pour M. Bayrou est qu'il est un général sans armée. A l'Assemblée nationale, avec trois députés, le MoDem est un tigre de papier pour M. Sarkozy. Aux municipales, sa stratégie à géométrie variable - tantôt allié au PS, tantôt à l'UMP, tantôt autonome - a tourné à la Berezina.
Sur les libertés, les institutions et, plus globalement, sur ce "mouvement de refus républicain" - de l'affaire Tapie au fichier Edvige en passant par le limogeage du contrôleur général de la police en Corse - que M. Bayrou aimerait porter, il y a d'indéniables convergences entre le MoDem et le PS. Il est loin d'en être de même au chapitre économique et social, en dehors de la lutte contre les déficits publics et pour le désendettement. Dans un entretien au Nouvel Observateur, Jean Peyrelevade, vice-président du MoDem, tient un discours très libéral sur la suppression totale des 35 heures et de l'ISF et veut pour "rétablir les finances publiques, privilégier l'appareil productif au détriment des ménages".
Le PS peut difficilement s'allier avec un "ami" qui veut sa perte. Il y a un consensus sur ce point, même si Mme Royal critique le "double langage" interne avec des alliances locales et un discours national fermé. Mme Aubry s'est alliée, au deuxième tour des municipales à Lille, avec le MoDem. "C'est un accord politique, pas électoraliste", avait-elle souligné. Pierre Moscovici invite le PS à "ne pas basculer dans une alliance au centre" et s'allie avec "La ligne claire" de Gérard Collomb et Jean-Noël Guérini, qui sont ouverts au "discours réformiste" de M. Bayrou.
L'ambiguïté est encore plus forte chez M. Delanoë, qui déjà doit se sortir des impasses consistant à s'allier virtuellement avec M. Hollande en étant entouré de ses principaux censeurs, au risque d'incarner plus la continuité que le renouveau. Un de ses principaux soutiens, Michel Rocard appelait, dans Le Monde du 14 avril 2007, Mme Royal et M. Bayrou à s'engager, avant le premier tour de la présidentielle, dans la voie d'une "alliance nécessaire". "Sur les urgences d'aujourd'hui, affirmait l'ancien premier ministre, rien d'essentiel ne sépare plus en France les sociaux-démocrates et les démocrates sociaux, c'est-à-dire les socialistes et les centristes". Et le 5 mai, M. Rocard avait salué le "courage" de Mme Royal prête à prendre des ministres UDF. Aujourd'hui, le PS ne peut miser ni sur une gauche en miettes ni sur un centre en pointillés. Mais ce cache-cache entre faux amis risque de rebondir avant 2012.
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