Voici l’analyse de l’Express sur la défaite de François Bayrou et du Mouvement démocrate aux municipales.
Dans sa traversée du désert, Pau ne sera pas son oasis. Au soir du second tour des municipales, le nom de François Bayrou est venu s’ajouter à la liste des personnalités battues. Même à 342 voix près, un échec reste un échec. Le 16 mars, la gauche a triomphé nationalement, mais celui qui se veut le premier opposant à Nicolas Sarkozy a perdu. La droite a sombré, mais le patron du MoDem lui a offert, lors d’un dimanche lugubre, sa meilleure nouvelle : sa propre défaite.
Cette fois-ci, contrairement à la présidentielle de l’an passé, François Bayrou avait accepté d’envisager avec ses proches, avant l’élection, ce qu’il devait faire en cas de désaveu. Sa réponse : ne rien changer. Les deux fondamentaux qui font selon lui un parti – un leader (lui-même) et une stratégie (l’alliance avec les républicains de gauche comme de droite) – sortent pourtant très abîmés de ces municipales. « Il prétend être président de la République et il n’est même pas capable de se faire élire maire face à une candidate peu charismatique », ironise le député PS Pierre Moscovici.
Cap sur la présidentielle de 2012!
L’autonomie et/ou les accords passés souvent avec le PS, parfois avec l’UMP, ont donné au final peu d’élus : un seul à Paris, aucun à Strasbourg ou à Lyon. La victoire à Mont-de-Marsan ne changera rien à l’affaire. « Il y aura une explication de gravure », promet Michel Mercier, qui a démissionné durant la campagne de ses fonctions de président de la fédération du Rhône. « Bayrou va s’effondrer », pronostique Hervé Morin, sûr de récupérer, au profit de son Nouveau Centre, nombre des cadres locaux du MoDem.
Même pas mort ! Cap, encore et toujours, sur la présidentielle de 2012 ! L’ex-troisième homme de 2007 va désormais s’atteler à la reconstruction d’une formation politique digne de ce nom. En regardant sur sa gauche et sur sa droite, François Bayrou est convaincu qu’il reste un chemin pour sa destinée. « Le congrès du Parti socialiste tournera autour de nous, imagine-t-il.
La question des alliances est la question qui se pose à toute la gauche européenne. Soit il y aura une explosion entre les partisans d’une alliance avec l’extrême gauche et ceux qui la souhaitent avec le MoDem ; soit il y aura une compétition entre le PS et moi. » Et la liste de ses présidentiables n’est pas pour l’inquiéter. Strauss-Kahn ? « On ne peut pas être le président du FMI et le candidat du PS à l’Elysée. » Delanoë ? « Je ne l’ai jamais entendu dire quelque chose d’intéressant sur le pays. » Royal ? « Elle ne sera jamais présidente : non en raison de ce qu’elle fait, mais de ce qu’elle est. » Hollande ? « Il est le plus dense. Mais il n’a toujours pas fait sa mue. »
Les gens lui disent: "La prochaine fois…"
L’observation des dix premiers mois de la présidence de Nicolas Sarkozy ne le fait pas plus douter. « J’ai toujours dit que cela n’irait pas au niveau de l’éthique et de l’esthétique », confie celui qui avait indiqué entre les deux tours qu’il « ne voterait pas » pour le président de l’UMP. Il y a tant et tant qui le sépare de lui depuis si longtemps : « Je me souviens qu’en 1994, autour de la table d’Edouard Balladur, Sarkozy rebaptisait Juppé “Juppette”. Quelle mesquinerie ! » Et puis, sur les routes de France, il raconte croiser tellement de gens qui lui chuchotent à l’oreille : « La prochaine fois… »
Un soir, attablée à une table paloise, Claude Della, une de ses colistières, lui avait glissé une conviction tirée de son expérience d’orthophoniste : « La première fois qu’un événement se répète, c’est un hasard ; la deuxième, une coïncidence ; la troisième, un schéma. » François Bayrou espère réussir à lui montrer un jour qu’il n’est pas qu’un homme de défaites.
© L’Express 2008
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