De la « troisième voie » de Tony Blair au « nouveau milieu » de Gerhard Schröder, la fin des années 1990 a été marquée en Europe par la recherche, à gauche, d'une nouvelle voie réformiste, capable de mordre sur le centre et battre en brèche le néolibéralisme qu'avait fait triompher Margaret Thatcher. Le succès de M. Blair lui a permis de contenir, grâce au système électoral britannique, la montée des centristes du Parti libéral démocrate qui espéraient profiter de la faiblesse des conservateurs pour s'imposer comme parti charnière. Ailleurs, presque tous les pays ont connu des systèmes d'alliances politiques alternatives qui ont, soit conduit à privilégier le centre, soit à l'éviter par des alliances avec les extrêmes ou des grandes coalitions. Même en Espagne, où la scène politique est dominée par les deux grands partis populaire et socialiste, aucun des deux n'a pu se passer de l'appoint de petites formations nationalistes modérées.
ALLEMAGNE : la brève domination de la démocratie chrétienne après la guerre a été battue en brèche par le Parti libéral, qui s'est longtemps imposé comme le parti charnière du centre. Après s'être allié avec la CDU-CSU, le FDP a constitué une coalition avec le SPD à partir de 1969. Les libéraux ont longtemps été composés d'une aile progressiste sur le plan des réformes de société et d'une autre représentant le libéralisme économique. En rejoignant de nouveau les chrétiens démocrates d'Helmut Kohl à partir de 1982, il verra son aile gauche s'affaiblir, ouvrant la voie au parti des Verts pour s'immiscer dans le jeu des alliances. Capitalisant sur la popularité du thème écologique, ceux-ci se sont peu à peu imposés au centre de l'échiquier, défendant un modèle social libéral ouvert aux réformes économiques. C'est sur eux que s'est appuyé le chancelier social-démocrate Gerhard Schröder.
BELGIQUE : compte tenu de la division du pays en deux grandes communautés linguistiques antagonistes et du système électoral à la proportionnelle intégrale, le régime de coalitions est la règle dans le royaume. Pourtant, même s'il se gouverne fréquemment au centre, le lieu par où passent les compromis politiques, un seul parti se revendique ouvertement du centrisme : le Centre démocrate humaniste, refondation du vieux Parti social chrétien wallon. Avant sa mue, le parti a régné sur la vie politique belge au long de la deuxième moitié du XXe siècle, avec son homologue flamand, le CVP - le Parti chrétien populaire qui a pris l'appellation de Chrétiens démocrates & Flamands, CD & V. Cette domination a duré jusqu'en 1999, où une majorité dite « laïque », composée de libéraux et de socialistes a fait voler en éclats les équilibres anciens. Le clivage entre chrétiens et non croyants est une autre ligne de fracture de la société belge et tant la gauche socialiste que la droite libérale aspiraient depuis longtemps à renvoyer les partis chrétiens dans l'opposition. Opposées sur le plan économique et social, ces familles politiques ont mis temporairement de côté leurs rivalités pour favoriser des avancées sur le plan éthique : la majorité « violette » de M. Verhofstadt a fait voter des textes sur la réforme du divorce, le mariage des homosexuels ou l'utilisation des cellules souches. Le Parti centriste francophone, qui a renoncé à son étiquette chrétienne, pourrait se retrouver aspiré par le succès probable de son ancien partenaire, le CD & V flamand, aux élections législatives du 10 juin.
ITALIE : Le régime parlementaire de l'après-guerre a favorisé la pratique de la « combinazione ». La Démocratie chrétienne (DC), la fameuse Baleine blanche occupa le centre de la scène politique italienne jusqu'au début des années 1990, s'imposant en garante d'une certaine stabilité. Les scandales de corruption et l'enquête « Mains propres » entraînant la désintégration de la DC, l'arrivée de Silvio Berlusconi, en 1994, ont entraîné une bipolarisation entre coalitions de droite et de gauche, dominée par le parti des démocrates de gauche, issu de l'ancien parti communiste italien. Cette bipolarisation a donné un poids accru aux petites formations marginales, comme à droite, la Ligue du nord, formation populiste, ou à gauche le Parti de la refondation communiste (PRC) de Fausto Bertinotti, qui provoqua la chute de Romano Prodi, en 1998. Depuis le retour de celui-ci au gouvernement, en 2006, c'est aujourd'hui au centre qu'évoluent désormais les partis charnières, héritiers nombreux et nostalgiques de la Démocratie chrétienne.
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