Avant d’être élu président des Etats-Unis, John Kennedy avait écrit (ou fait écrire…), un petit livre sur le courage en politique. Cette notion de courage dans la sphère du politique est essentielle si l’on veut comprendre comment des femmes et des hommes ont réussi à faire changer les choses (et non à seulement accompagner le changement) quand il semblait impossible de le faire.
Bien sûr, l’éternel débat entre philosophes, politologues et sociologues qui consiste à savoir si les idées précèdent les faits ou si ce sont les faits qui modèlent les idées a encore de beaux jours devant nous. Néanmoins, il est intéressant de revenir sur une des principales idées de la deuxième partie du XX° siècle et, curieusement ( !) pratiquement oubliée des candidats à l’élection présidentielle : l’union de l’Europe. Nous avons déjà dit ici quelle chance cette union pouvait représenter pour l’avenir de la France et des Français. Grâce à l’Europe, non seulement notre présent est meilleur que ce qu’il aurait du être mais elle permettra à l’avenir d’être souriant si nous savons continuer cette construction. Actuellement, les candidats rivalisent « d’idées nouvelles » selon eux pour offrir à notre pays un avenir qu’ils prédisent radieux. Dans ces envolées lyriques, l’Europe est, malheureusement, très absente. Comme si nous étions redevenus une grande puissance qui va de nouveau prendre son destin en main toute seule…
L’Europe une vieille idée toujours neuve…
Cette idée d’une union politique de l’Europe était dans l’air depuis fort longtemps puisque certains font remonter la volonté d’unifier le continent européen jusqu’à l’empire romain, à Charlemagne, à l’empire romain germanique ou à Henri IV sans parler des grands penseurs qui ont souhaité l’union de ces états qui se faisaient continuellement la guerre. Mais il a fallu la détermination et le courage d’une poignée de visionnaires et de pragmatistes pour que l’Europe voulue, entre autres, par Briand et Churchill voie le jour sous les impulsions de quelques hommes politiques dont Robert Schuman et Jean Monnet en France. Et le courage était de dire à l’époque que des millions de morts pouvaient être oublié pour bâtir un monde meilleur, non seulement sans rancune mais en se donnant la main et en partageant.
Alors que notre époque nécessiterait cette union et ce partage de l’effort sur notre continent, on cherche désespérément en France mais aussi dans les autres pays européens des hommes politiques assez courageux pour se mouiller pour l’Europe. Rappelons-nous le référendum de 2005. Lorsque les politiques ont commencé à comprendre que le non pouvait l’emporter, la plupart, si ce n’est l’ensemble des partisans du « oui » au Traité Constitutionnel se sont ménagés des portes de sortie si bien qu’ils parviennent à apparaître aujourd’hui comme neutres en cette matière à l’heure de l’élection présidentielle… Drôle de courage politique de ne pas parler de ce qui fâche alors que de nombreux politiques savent que rien ne se fera sans l’Europe.
Evidemment, tous les candidats à cette présidentielle réagiront si vous leur tenez ce discours et vous jureront, la main sur le cœur, qu’ils ont parlé de l’Europe, qu’ils en parlent et qu’ils en parleront. C’est vrai mais… pour mieux l’enterrer la question ! Mini traité (avec quoi ?), nouveau référendum (dont on connaît la réponse), coopération renforcée (mais de quoi ?), les idées minimums font florès. Mais les grandes ambitions, les grands desseins, les grandes envolées lyriques sont au placard et l’on sent qu’elles y sont encore pour longtemps. Vous avez dit « courage politique » ?!
L’Europe est de plus en plus une nécessité
Depuis le « non » néerlandais et, surtout, français, l’Europe est en panne. Or, les défis du XXI° siècle n’ont pas décidé, dans un élan généreux pour notre pays et notre continent, de se mettre en hibernation le temps que nous prenions le temps de réfléchir à notre avenir ! La Chine et l’Inde - les méchants ! – ont donc continué à se développer suivit en cela par le Brésil et quelques autres pays. Les Etats-Unis et le Japon ne demeurent pas les bras croisés ainsi que la Corée du Sud et, surtout, la Russie qui se rêve à nouveau leader de l’Europe après avoir constaté que l’Union Européenne s’apparentait par les temps qui courent à une coquille de plus en plus vide.
Quant aux terroristes, aux guerres, aux batailles économiques, à l’émigration déstabilisatrice des économies, ils sont encore là et pas devant le petit écran pour apprécier les débats de notre élection présidentielle mais sur le terrain pour modeler le monde et, le plus souvent, sans l’Europe.
Bien sûr, nous allons fêter le 9 mai prochain les 50 ans du Traité de Rome. Et, à cette occasion les politiques, de nouveau la main sur le cœur, diront quelle belle idée que l’Europe, qu’il faut la relancer, qu’il faut l’approfondir, qu’il faut la remettre sur les rails. Et tout le monde sera d’accord sauf quelques nationalistes impénitents et quelques rétrogrades habillés dans des habits « rebelles ». Mais, concrètement, que fait l’Europe ? Rien ou presque car elle ne peut plus avancer depuis le référendum français.
Le courage politique dont nous parlions au début, ce serait de parler de l’Europe et de dire, sans équivoque, que sans elle rien ne sera vraiment possible. Que la plupart des promesses et des dépenses que font généreusement les candidats à la présidentielle ne feront rien ou presque si la France travaille seule dans son coin.
Il ne s’agit pas ici de dire que l’on aime ou non l’Europe. La problématique n’a rien de sentimentale. Car l’Europe est, non seulement, notre chance mais notre obligation d’aujourd’hui et de demain. Tant que cette réalité inéluctable ne sera pas réellement entrée dans le conscient et l’inconscient collectif comme une donnée incontournable, rien ne se fera et les référendums se termineront à chaque fois comme celui de 2005. Et, à chaque refus de construire un véritable avenir, la France et l’Europe hypothèqueront celui-ci jusqu’au jour où nous ne pourrons plus racheter cette hypothèque…
A force de vouloir aller dans le sens de la facilité, les politiques s’exposent à la sentence de Vauvenargues : « L’art de plaire est l’art de tromper ». On est bien loin du courage politique…
Alexandre Vatimbella
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